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HISTOIRE CEUTRONE
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                                                                       Préface
 
           
            Les Provinces de Tarentaise et Maurienne, se différentient de l'ensemble de la Savoie par leurs préhistoires. En effet ces 2 provinces (1/3 de la Savoie) ne comptent pas, parmi leurs ancêtres, les Allobroges.
 
            En Maurienne, existaient deux peuples celtes : Les Médulles depuis Aiguebelle jusqu'au dessus de Modane et les Graïocèles sur les 2 versants du Mont-Cenis.
            Une troisième tribu mal connue, quelque peu mystérieuse, dont la seule trace se trouve sur le ''Trophée de la Turbie'', est appelée ''Acitavones'' . Selon certains, elle occupait les deux versants de l'Iseran, c'est à dire les communes de Tignes, Val d'Isère, Bonneval sur Arc et Bessan, avec peut-être, leurs voisines Piémontaises .
           
            La Tarentaise, avec le Beaufortain, le Val d'Arly, la haute vallée de l'Arve et le Val Montjoie constituaient la Centronie ou Ceutronie. A cette époque reculée de l’histoire, les habitants de ces lieux, s’ils connaissaient une forme d’écriture, ne s’en servaient pas. C’est pourquoi, grâce à la visite de plusieurs expositions et musées, en reprenant quelques textes traduits du latin, la lecture des historiens locaux, de nombreux livres traitant des peuples Celtes, d'une étude sur le monument du ''trophée de la Turbie'', etc., nous vous proposons une histoire de la Ceutronie ou Centronie.
Vous trouverez en italique des textes repris sur des documents et ouvrages divers. Se reporter à la liste bibliographique en fin de texte.
 Nous n'avons pas, ici, la prétention de vous conter la stricte histoire du peuple Ceutron ; elle est d'ailleurs assez mal connue. La juxtaposition permanente, de faits historiques, légendaires, voir imaginaires, laisse à chacun la possibilité de reconstruire le passé de ses ancêtres selon ses goûts !
 
Enfin, quelques descriptions nous semblent franchement douteuses, hasardeuses, voir fantaisistes (quoique!...); elles proviennent du : Syndicat Officiel de l'Union Ceutronique Indépendante (S.O.U.C.I.). A chaque fois que   nous ferons appel à leurs écrits, vous trouverez soit en tête du chapitre, à la suite du titre, soit avant la phrase concernée, l'indication : (S.O.U.C.I.). Nous les avons conservés dans un souci d'équité et afin d'être le plus complet possible.
 
                                               Les  premiers  hommes
 
 
 
Primitivement, la Centronie était couverte d’épaisses forêts, repaire assuré d’un grand nombre d’animaux féroces, tels que l’ours, le loup, le lynx et les oiseaux de proie, et une multitude d’autres bêtes sauvages, telles que le daim, le chamois, le bouquetin, le renne, le lièvre, le blaireau, la marmotte, et d’autres gibiers en abondance.
 les Alpes étaient occupées, d’Orient en Occident, par de nombreux peuples, possédant chacun diverses vallées. Ces peuples alpins étaient rudes, âpres et robustes comme leurs rocs, dépendant d’un sol qui leur était un nourricier sévère et parcimonieux, tout en exigeant beaucoup de travail et d’effort.
 Comment se sont formées ces populations ? Les premiers hommes pénétrèrent dans nos Alpes voilà environ 10 000 ans ; sans doute des chasseurs téméraires pour se nourrir, se vêtir, inconsciemment épris d’aventure et de liberté. Ils s’établirent et formèrent les premiers  villages. Notez que la valeur ‘’Liberté’’ était déjà dans l’esprit des tous premiers occupants de la Tarentaise !
A l’âge de la pierre polie (néolithique), des tribus venues de l’Est domestiquent les animaux, cultivent le sol, façonnent l’argile, tissent de grossières étoffes. Dégagée des glaciers, la montagne n’est plus un obstacle à la pénétration humaine ; les grandes rivières Isère, Arve, Arc sont donc remontées. Les monuments mégalithiques attestent, aujourd’hui encore, la multiplication de ces stations préhistoriques : menhirs de Feisson-sous-Briançon et de Planvillars, cromlech du Petit-St-Bernard (qui conserve 43 menhirs) et de nombreuses pierres à cupules.
Les premières clairières sont défrichées ; arbres abattus avec des haches en pierre polies. On y cultive des céréales, des légumes et des fruits. Leur armement se compose de flèches tranchantes, de casse-tête et de poignards en silex.
Leurs sépultures sont collectives ; les morts ne sont pas brûlés, mais déposés dans des allées couvertes ou dans des tumuli à chambres multiples.
Durant le deuxième millénaire précédant notre ère, à l’âge du bronze, les rivages des lacs connaissent l’épanouissement de la civilisation des palafites ou agglomérations lacustres.  Bracelets de bronze, colliers en perles de cuivre, faucilles, bijoux féminins, parures de guerriers se répandent dans tout l’ensemble montagnard à présent occupé par les trapus et tenaces ligures. Leur outillage témoigne de notables progrès ; les ligures exploitent et fondent le cuivre qui, allié à l’étain, donne des épingles, des lances, des faucilles, des coutelas…L’ambre de la Baltique permet la confection de parures funéraires.
Ils construisent les premières maisons en pierres sèches, en forme de rectangle arrondi, les murs font environ 1,50 m. de hauteur, avec des toits en bois à deux pentes. Leur armement fait appel au cuivre : poignards à languettes, têtes de flèches, haches.
Ils ont laissé comme apport culturel : la charpente. Leurs sépultures étaient sous la maison. Bien des noms de rivières et de montagnes (en particulier là, où le nom des rivières contient les syllabes ar, or ou er), certains termes usuels descendent d’ailleurs du vocabulaire de ces premiers hommes. Ils étaient probablement moins de 3.000 sur toute la Centronie.
Au XXe siècle, «l’autochtone brun et de taille moyenne, à la tête forte, au corps agile et endurant » est toujours «l’homo-alpinus » des ethnologues.
Les premiers habitants, de notre province, s’établirent d’abord sur les deux versants de l’Isara (l’Isère), des Dorons de Beaufort et de Bozel et dans la haute vallée de l’Arve, où ils créèrent de magnifiques oasis, fermées et abritées par les bois touffus qui recouvraient la plus grande partie des collines et des montagnes ; mais, soit la trop grande quantité des animaux nuisibles qui les peuplaient, soit surtout le besoin de défricher des terres nouvelles, pour alimenter la population toujours croissante de ces pays, les habitants, tantôt les coupaient pour s’en servir dans leurs besoins domestiques, tantôt les livraient aux flammes pour accélérer la transformation du sol à des besoins nouveaux.
Plusieurs siècles passèrent, vinrent les invasions… Les Celtes, originaires du sud de l’Allemagne et des bords de la Volga, s’installent dans la future Savoie au second âge du fer, entre 700 et 400 av. J.C. (époque dite de la Tène, du nom d’une station Suisse du lac de Neufchatel).
Le nom des Celtes, apparaît chez Hécaté de Milet (vers - 500) et Hérodote (vers – 450). Il viendrait de l’Indo-européen keletos: rapide ou kel-kol: habitant, colon. Le mot Galate (signifiant : «ceux d’ailleurs » ou «envahisseurs ») apparaît dans la littérature grecque en 279 av. J.C.
Galli (traduction latine de «Galates »)apparaît pour la première fois en 168 av. J.C. Dans  ''les origines'' de Catton l’Ancien. Selon Plutarque, les Galates font partie de la race celtique ; sous Auguste, ils habitaient les Alpes, les Pyrénées jusqu’à l’océan, la forêt hercynienne. Nous pouvons dire que les mots : Celtes et Gaulois désignent le même peuple. Gaulois est simplement le nom utilisé par les romains pour désigner ces Celtes qui résidaient depuis un millénaire au nord de leur empire naissant. D’après Amédée Thierry, ils avaient les cheveux blonds, le teint blanc, la taille haute, ils parlaient fort et travaillaient bien.
 
 
 
 
                                                           La Centronie
           
 
                                  
En ces premiers temps, où, les plus forts prenaient les meilleures terres des plus faibles, à chaque vague de conquêtes, les vaincus se divisaient en deux parts : ceux qui restaient au sol, acceptant la sujétion, serfs ou esclaves, et ceux qui, trop fiers pour se soumettre, gardaient la liberté en partant à l’aventure. Les vaincus fugitifs et libres ne trouvaient asile et repos que dans les plus âpres contrées dédaignées par les conquérants, dans les montagnes. Ainsi, pour la seconde fois, il se confirma en Tarentaise une population animée par un sentiment de liberté qui l’avait conduit vers ces rudes protecteurs : les monts. On pense au vers ou Musset compare Rolla à ces êtres :
Qui ne sauraient plier ni leur cou ni leur aile,
           Et qui n’ont pour tout bien qu’un mot : la liberté
         Au moins 500 ans avant notre ère, les habitants de la Tarentaise (et même d’une partie de la Savoie) étaient donc les Centrons, Centrones ou Ceutrons. Le nom de cette peuplade se rencontre dans cinq auteurs : César, qui écrivait, cinquante ans avant l’ère chrétienne, Strabon et Pline l’ancien, qui vivaient au premier siècle après J.C., Polybe et le géographe Ptolémée qui appartient à la fin du deuxième. Leur témoignage est corroboré par des textes épigraphiques des trois premiers siècles.
Ce peuple était, à ce que l’on pense, d’origine celtique ; c’est-à-dire les descendants des peuplades indo-germaniques, qui, dans les temps primitifs, couvrirent l’Europe centrale et occidentale, et qui, refoulés vers l’Atlantique par des mouvements de populations aujourd’hui inconnues, n’existèrent plus qu'en  Gaule,  Grande-Bretagne, Calédonie et Hibernie. La nomenclature locale démontre également une origine celtique.  C’est d’un mot réputé gaélique, craig, c’est à dire «rocher », que l’on a fait dériver le nom de leurs montagnes : Alpes graies ou grées serait l’équivalent «d’Alpes rocheuses ». On ne sait, s’il y avait quelque lien de parenté entre nos Ceutrons, et une tribu belge, dont le nom identique au leur, est également sujet à des variantes. Il existe également, en Belgique, un fleuve côtier du nom d’Yser ; - coïncidence ? -
L’invasion celte se fit par vagues successives et dura probablement plusieurs siècles. Les Celtes installés en Centronie furent potentiellement plus nombreux que les premiers habitants. Les Allobroges, arrivés plus tard en Savoie, occupèrent les basses vallées, soumettant leurs habitants. Là, encore une fois, une nouvelle sélection s’opéra, les plus fiers se replièrent dans les hautes vallées pour conserver leur liberté. Ainsi se forma ce peuple Ceutron, depuis les tous premiers chasseurs, jusqu’aux derniers arrivants, à chaque fois un tri, basé sur le refus de soumission, composa une race sélectionnée d’hommes libres.                                                       
Il est important de souligner cette vertu primordiale dans nos vallées ; la Liberté durant des millénaires et encore aujourd’hui sera la valeur de référence pour les tarins !  
            La Centronie embrassait toute la Tarentaise actuelle, depuis la cime des Alpes Grecques, Grées ou Graies jusqu’à l’Arly, la vallée de Beaufort et le haut Faucigny jusqu’à Passy, (les deux vallées passées depuis au Faucigny : celles de Saint-Gervais ou du Bonnant et de Chamonix) où l’on a découvert l’ancienne voie qui mettait ce peuple en communication avec le Valais par la vallée de Chamonix.
            Les peuples qui l’avoisinaient étaient : les Allobroges au couchant, les Véragres et les Octodurenses au nord, qui occupaient la vallée de Martigny ; les Salasses au levant, actuellement les habitants du Val d’Aoste ; les Garocelles ou Graïocelles au midi, qui, selon quelques auteurs, peuplaient les deux versants du Mont-Cenis, et les Médulles qui s’étendaient dans la Maurienne actuelle.
            Ainsi la Centronie possédait-elle une multitude de vallées secrètes et fertiles et de sommets glaciaires parmi les plus hauts d’Europe. Ces derniers décourageant les conquérants envieux, par les conditions climatiques rigoureuses qu’ils imposaient au pays.
 
 
 
 
 
                                               Cheminement géographique
 
 
 
            A l’extrémité ouest, la vallée de l’Isère, plus basse, constituait l’entrée principale de la Centronie. Cette entrée se situe sous le rocher de Conflans, on y trouve l’altitude minimum du pays 340 m. L’Isère est déjà partiellement assagie. En remontant, nous trouvons le défilé de Briançon où, plus tard, les comtes du même nom avaient un château fort et rançonnaient les voyageurs ; ce fut certainement, pour les Ceutrons, un lieu de repli et un verrou efficace pour empêcher  les envahisseurs d’avancer plus avant sur leur terre.
            Suit alors une vallée étroite et encaissée jusqu’au bassin d’Aigueblanche où, prennent naissance deux vallées secondaires. La première, très pentue et resserrée, mène au col de la Madeleine, d’où l’on redescend, au sud, chez les Médulles. La seconde très ouverte et riante conduit aux Avanchers.
 Après le bassin d’Aigueblanche nous pénétrons dans une gorge très escarpée. Hannibal dut tailler un passage pour faire passer ses éléphants (le lieu porte, encore aujourd’hui, comme nom : ‘’Les Echelles d’Hannibal’’).
 Ce détroit franchi, nous arrivons dans un second bassin très refermé sur lui-même ; là est situé Daratensia (Moutiers) qui fut, après les époques Celte et romaine, la capitale de la Tarentaise. Ici, se rejoignent, l’Isère et le Doron de Bozel. Sur la rive gauche, nous trouvons d’abord la vallée suspendue des Bellevilles, où furent retrouvées un grand nombre de sépultures de l’époque Celte, attestant une occupation très ancienne de cette vallée par l’homme. Des Bellevilles, par les Encombres, on échangeait également avec les Médulles.
 En suivant le Doron, nous entrons dans une importante vallée secondaire de Centronie : la vallée de Bozel, ramifiée par les vallées des Allues, de Pralognan et de Champagny. Sur ses flancs et dans la vallée même de nombreux villages importants se sont construits.
 Hors de la voie principale, conduisant au col du Petit-St-Bernard, ses habitants eurent certainement une vie plus calme, moins en contact avec les différentes armées. Les Ceutrons, du Doron de Bozel, n’en étaient pas moins des guerriers agriculteurs solidaires et volontaires pour des guérillas ou des expéditions lointaines. Ils étaient, par les cols de la Vanoise, en contact avec les Médulles et les Graïocèles. Sur l’autre versant par les cols de la Chiaupe, de Plan Séry ou du Palet, ils retrouvaient la vallée principale de l’Isère.
Celle-ci après Moutiers, reste étroite jusqu’au fameux détroit du Siaix ; lieu chargé d’histoire, s’il en est, de la Centronie et plus tard de la Savoie. Encore à la dernière guerre, les résistants savoyards écrasèrent un convoi de soldats allemands, avec des rochers projetés dans le vide !
Le Siaix ou Saix ou détroit du Ciel : « Voici l’une de ces portes que la nature fait d’un jeu de sa main. Deux rocs sont déchirés l’un de l’autre à une profondeur effrayante pour laisser écouler les eaux de l’Isère, qui sans ce passage formerait un lac dans la vallée supérieure. Le détroit du Siaix fut en quelque sorte les Thermopyles des Ceutrons. Le boulevard de plus d’une grande scène de guerre ».
La route actuelle passe à mi-hauteur dans un long tunnel. Auparavant elle passait plus haut dans cet immense rocher, mais, longtemps avant ce travail dù à la hardiesse de Charles-Emmanuel III, le chemin était au fond du précipice. C’était la voie romaine dont il reste encore des vestiges que leur vétusté semblerait faire confondre avec les productions abruptes du reste de la nature.
 La voie romaine avait d’ailleurs repris le cheminement naturel tracé par les Ceutrons depuis plusieurs siècles. C’était une lutte incessante entre la rivière, gonflée par la fonte des neiges au printemps ou subitement grossie par des orages en été, et les hommes qui accumulaient les pierres et les rochers pour garder un étroit passage entre la falaise et l’eau bouillonnante et grondante comme plusieurs torrents de montagne réunis.
 L’approche de ce lieu se faisait toujours dans une sorte de crépuscule brumeux. Le soleil ne paraissait jamais au fond de ce boyau étroit. Le ronflement de l’eau brassée en émulsion, les claques, qu’en saccades, donnait le flot sur les rochers, les pierres roulant au fond du lit qui s’entrechoquaient, produisaient un bruit d’enfer, amplifié par le double écho des parois verticales qui s’élevaient si hautes, quelles se perdaient dans l’infini d’un ciel à peine apercevable. Les guerriers Celtes ou les voyageurs, qui devaient franchir cet écueil redoutable, pensaient inévitablement à l’antre d’un dragon ou d’un démon local maudit. La peur des Ceutrons que le ciel leur tomba sur la tête, était ici justifiée ; tant la verticalité des parois rendait instable la moindre pierre, au-dessus d'eux.
Ce sinistre passage franchi, s’ouvre alors la petite plaine de Centron. Ce village a gardé le nom du premier peuple qui s’y installa ; pourquoi ? … Alors que le bas de la vallée a put être, occasionnellement, envahit, Les Ceutrons, bénéficiant de cette porte inviolable que constituait le détroit du Siaix, étaient à partir de ce village véritablement chez eux ; d’où le nom Centron.
Passé Villette, on arrive à ce qui fut une capitale sous l’occupation romaine : Axima (Aime). La vallée est maintenant, jusqu’à Bergentrum (Bourg-St-Maurice) largement ouverte et agréable avec un « adret » très chaud ou pousse encore de la vigne et un « revers » couvert d’immense forêts.
A Bourg, part la route vers Les Chapieux, vallée suspendue qui donne accès au col de la Seigne, pour aller chez les Salasses ; ou au col du Bonhomme pour rejoindre soit le Beaufortain riche vallée de pâturages soit les Contamines et plus loin la haute vallée de l’Arve le tout faisant partie de la Centronie ! C’est là que se trouvent les plus haut sommets avec une faune certainement riche à l’époque. Plus au nord on retrouve les tribus Véragres et Octodurenses.
Revenons à Bourg, pour suivre à nouveau la voie romaine et remonter après Séez en direction de la Colonne Joux (Petit-St-Bernard) qui relient Ceutrons et Salasses. Ce col, souvent cité par les historiens, nous permet de reconstituer partiellement notre histoire des Ceutrons.
Enfin la haute vallée de l’Isère jusqu’à sa source est plus resserrée. Elle ramène à nouveau vers les hauts sommets, avec des glaciers qui devaient être importants à l’époque. Tout près des sources de l’Isère, le mont Iseran permet de communiquer avec les Garocelles.
 
 
 
                                                           Les Ceutrons
 
 
 
          Les Ceutrons, guerriers dans l’âme, étaient un peuple franc et loyal, adonnés à l’agriculture et au soin des troupeaux ; intrépides autant que prévoyants et adroits, mais toujours bons et hospitaliers. Ce qui ne les empêchait pas d’être également pillards. Les historiens anciens se plaignent de leurs latrocinii ; ils fondaient, à l’improviste, sur les riches villes de la plaine.
Amédée Thierry (Histoire des Gaulois), raconte que, pendant le siège de Rome par les Gaulois, en 390 av. J.C., ceux-ci ne se décidèrent à traiter qu’après avoir reçu avis que les montagnards des Alpes pillaient leurs terres. Faut-il penser que les Alpins, victimes de conquérants, trouvaient dans leur esprit frustre de primitif, une âpre satisfaction de faire à leur tour des victimes, parmi les populations riches et puissantes ? Possible ; d’autres historiens, tout aussi crédibles, les voient participer avec le fameux chef gaulois Brennos (appelé également Brenn ou Brennus) à ce même siège de Rome !
A moins que les plus aventureux soient partis, en quête de gloire, avec Brennos ; les autres pillant les villes de plaine pour assurer un peu de confort supplémentaire à leurs familles. Cela dura plusieurs siècles, puisque selon la démonstration convainquante de Joseph Henriet (Les Sarrasins des Alpes), les fameux sarrasins ne seraient que des autochtones alpins.
          Il nous est aisé de croire que la chasse fut d’un grand produit chez ces peuples : on abattait l’ours, le bouquetin, le chamois. Le pays est encore aujourd’hui éminemment propre à l’élevage du bétail. Selon Strabon, le fromage était l’un des principaux produits des hauts plateaux. Les abeilles donnaient la cire et le miel. D’immenses forêts de sapins on tirait de la résine, de la poix et des torches. Ajoutons l’exploitation de quelques minéraux, et, en particulier, du cuivre qui entrait dans la composition du bronze.
            Il ne faudrait pas oublier les tributs que les marchands et les voyageurs payaient aux peuplades dont ils traversaient le territoire. Il n’est guère douteux que les Ceutrons aient frappé de contributions les étrangers qui passaient chez eux. Dans leur voisinage, les Salasses et les Véragres étaient fameux par leurs exactions.
Si les mœurs des Ceutrons étaient identiques à celles des tribus limitrophes, on n’a cependant aucune notion sur les rapports qu’ils entretenaient avec elles. On ne sait s’ils formaient une confédération permanente avec les Graïocèles (Mont-Cenis) et les Caturiges (haute Durance), auxquels on les trouve associés, une fois, en 58 av. J.C. On ignore quelle était leur situation vis-à-vis des Allobroges, avec lesquels, dans la suite, leurs descendants se sont si intimement mêlés. Comme à l’époque romaine (74 après J.C.), on les voit, sur une question de limites, en différend avec cette nation puissante, il ne serait pas impossible qu’arrivés, les premiers, dans les bassins de l’Arve et de l’Isère, ils aient été, plus tard, refoulés par les Allobroges jusqu’au pied du Mont-Blanc et dans les massifs abrupts des Alpes Grées.
 Il est permis de penser que leurs relations avec les Salasses étaient des plus amicales. En remontant l’axe principal de leur vallée réciproque, ils étaient amenés, inévitablement, à se rencontrer à la Colonne Joux (1). Le cromlech du Petit-St-Bernard, construit à cheval sur la ligne de partage des eaux, frontière naturelle reconnue de tous temps, en est le témoignage.
D’après les légendes de l’antiquité, l’Hercule grec ou thébain, dans ses pérégrinations en occident, aurait traversé leur pays. De là, serait venu à leurs montagnes - selon une étymologie longtemps accréditée - le nom d’Alpes Grées ou Grecques. Plus tard, cette opinion donna lieu au culte que l’on rendit à Hercule, au défilé du Petit-St-Bernard, à Salins et à Bergintrum (Bourg-St-Maurice). On a conjecturé aussi que les Ceutrons firent partie des bandes guerrières qui, sous la dénomination de Gésates, passèrent en Italie pour soutenir les Gaulois Cisalpins contre les romains (222 av. J.C.)
 Pourtant, libres et indépendants, ils n’ambitionnaient rien de plus que la douce tranquillité de leurs chalets. S’ils rêvaient à la gloire des combats, ils n’attaquaient jamais leurs voisins dans le but d’agrandir leur territoire et par suite leur puissance dominatrice. S’ils se lancèrent, occasionnellement, dans des expéditions guerrières, c’était uniquement dans la prévision d’un butin pour améliorer «l’ordinaire ». S’ils étaient attaqués, ils savaient se défendre en braves ; les armées vaillantes et intrépides de la superbe Rome ne pouvaient que difficilement résister à leur audace et à leur impétuosité.
          Ils ne craignaient rien, confiant dans leur agilité à s’éloigner du danger, en gagnant leurs hautes retraites à peu près inaccessibles. Habitués qu’ils étaient à gravir les montagnes les plus abruptes, à franchir les rocs les plus escarpés, à glisser légèrement et inaperçus sur des filets étroits, où les chamois eux-mêmes auraient eu peine à passer, ils remontaient à la course les collines les plus raides, franchissaient les monts et les vallées avec une rapidité étonnante.
          Leurs habiles manœuvres, jointes aux difficultés d’un sol inconnu et surtout difficile à reconnaître pour l’étranger, à cause des nombreux défilés qui se croisent et s’entrelacent, jetèrent pendant de longues années le veto sur les armées les plus aguerries et les plus vaillantes de Rome.
          Ecrasés sous les énormes blocs de pierre que ces terribles montagnards roulaient avec fracas du haut des montagnes, les romains, victorieux de l’univers entier, se voyaient barrer le passage par une simple poignée de Ceutrons ; en tout autre lieu et devant tout autre peuple les légions romaines n’auraient pas daigné opposer à un si petit nombre leur valeur et leur puissance ; mais contre les Ceutrons, force leur était de vaincre ou de se retirer promptement des détours inconnus de ce labyrinthe, où chaque coin pouvait leur devenir funeste.
           Toutes les manœuvres des maîtres du monde, leur force et leur adresse, étaient inutiles contre ces cyclopes des Alpes. Atrox coelum perinde ingenia, disaient en parlant d’eux les historiens de Rome. L’humeur âpre et fière de cette nation répond à la rudesse de son climat.
           Pline les appelait gentes intonsas, probablement parce qu’ils ne se coupaient pas les cheveux. Ils étaient déjà un peu avancés dans la civilisation, puisque au rapport de Polybe, ils possédaient des places fortifiées avant l’an 534 de Rome, et qu’ils avaient soin de les faire approvisionner. Leur principale divinité était le dieu Penn.
 
(1) Colonne Joux : Les appellations successives furent :  « In Alpe Graïa », puis « La Colonne Joux » et enfin « Col du Petit St Bernard ».
 
 
 
 
                                               Hannibal et les Ceutrons
 
 
 
La plupart des historiens sérieux s’accordent, aujourd’hui, à reconnaître le passage d’Hannibal à travers la Centronie et les Alpes grecques. Nous n’avons pas la prétention de nous mêler de ce débat entre spécialistes. Nous pensons simplement qu’un grand stratège et grand général comme Hannibal n’aurait certainement pas engagé une telle armée, dans la traversée des Alpes, par un col inconnu à plus de 2200 mètres d’altitude avec des éléphants. A cette époque (et longtemps plus tard), la haute montagne était supposée être le repaire d’esprits malfaisants, de dragons, etc. …Seul la Colonne Joux, appelée ensuite col du Petit St Bernard, était suffisamment connue dès la plus haute antiquité. Par-là, passait la fameuse voie Agrippa qui reliait Vienne à Milan et qui fut la seule carrossable à travers les Alpes dès l’an 3 après J.C. Il fut le passage le plus fréquenté des Alpes jusqu’au 9eme siècle de notre ère où, Charlemagne, donna définitivement la priorité au Mont-Cenis. La sagesse d’Hannibal et de ses guides ne pouvait que lui conseiller le passage du Petit St Bernard.
 Des ossements d’éléphants furent trouvés sur le plateau du col au siècle passé. Des noms de lieu comme «les Echelles d’Hannibal » près d’Aigueblanche, «la Tour d’Hannibal », «la Table d’Hannibal » nous portent à penser que les Ceutrons virent défiler les armées, et leurs éléphants. Selon les moines mauriciens (en poste, à l’hospice du Col du petit St Bernard, dans les années qui suivirent la guerre de 1914-18), grands chercheurs sur l’histoire ancienne locale et connaissant parfaitement les lieux, cette armée fut même attaquée, au pied du col (dans le secteur de Séez), par les Ceutrons qui, aidés par le relief, l’altitude et le climat, lui firent subir de lourdes pertes. Les mêmes moines ont situé, avec précision, le fameux rocher friable, sur lequel fut déversé du vinaigre bouillant pour le dissoudre, permettant ainsi de tracer un passage.
Les premiers Ceutrons, à voir défiler l’armée d’Hannibal étaient postés sur le rocher de Conflans. Cette armée était guidée et accompagnée par des tribus Allobroges, avec lesquels elle avait conclu une alliance provisoire. Arrivés sur la rive droite de l’Isère et de l’Arly, les Allobroges indiquèrent à Hannibal la direction à suivre, puis firent demi-tour. Les Ceutrons époustouflés par des animaux qu’ils voyaient pour la première fois et dont ils ne soupçonnaient même pas l’existence, comptèrent 37 éléphants. Les Salasses en auraient vu : 11 selon certains, 7 selon d’autres. Les attaques des Ceutrons sont certainement la cause de la perte de plusieurs pachydermes. La montagne et le climat firent plus de dégâts.
Cette armée, qui a laissé, jusqu'à nos jours, un souvenir de puissance et d’organisation inconnus jusqu’ici, redoutait le franchissement des Alpes. (S.O.U.C.I.) Les Ceutrons présomptueux et courageux en diable se sont-ils lancés un défi pour harceler ces troupes ? Ou (toujours en quête de nourriture), dans leurs rêves les plus fous, se voyaient-ils en train de fumer un jambon d’éléphant ? Nous ne saurons jamais ce qui les poussât à ces coups de mains contre Hannibal.
''ECO & VOUS'' de mars 2006 écrit : «En Gaule une puissante et guerrière tribu, les Allobroges, se fait connaître par sa bravoure. Pour empécher Hannibal de franchir les Alpes, ils attaquent son armée dans les défilés et jettent sur elle des récipients de forme arrondie, remplis de suif enflammée, cintrés au feu et cerclé de bois. Ce sont les premiers tonneaux. Puis les Allobroges ont eu l’idée d’utiliser ce récipient étanche, capable de supporter la pression, pour la conservation et le transport sans risque du vin. Mieux adapté que la fragile amphore, il fut vite adopté.»
Il s'agit en fait des Centrons et de leurs défilés. Les Allobroges habitaient de larges vallées.
Le passage des Alpes (Jean Desfrasne, récits tirés de l’histoire de Rome, Nathan)
Bientôt, la neige tombe. Quand vient l’aube froide et triste, les soldats s’équipent avec lassitude, ils bouclent leurs sacs de leurs doigts gourds…Et lorsque la tempête donne le signal du départ, la colonne s’ébranle lentement sur les pentes verglacées.
On glisse, on se retient à quelques branches pour glisser à nouveau, on s’aide des mains, des genoux. Le froid raidit les membres et mord les visages. L’éclat de la neige brûle les yeux. Les hommes exténués de fatigue, de faim, de peur aperçoivent, dès qu’ils lèvent la tête, une muraille de roche perdue dans les nuages.
Ce n’est plus une marche ordonnée, confiante, mais une lutte de tous les instants contre l’hostilité de la nature. La colonne s’est allongée sinistrement pour se briser par endroits, des masses noires trébuchent et tombent, des grappes d’hommes et de chevaux roulent au fond des ravins. Parfois des appels, des cris, puis un grand silence.
L’armée au prix de durs efforts poursuit sa route dans une brume pesante et ouatée. Ces montagnes finiront-elles un jour ?
De l’autre coté sans doute, c’est l’Italie, ce sont les plaines verdoyantes baignées par le Pô. C’est la délivrance et le soleil. Mais combien y parviendront-ils ? Combien resteront ici même, couchés dans un linceul de neige ?
Et maintenant voici que la route est complètement barrée par des roches infranchissables. Au travail ! Il faut tailler la pierre, s’ouvrir un passage à travers le roc.
On coupe les arbres et les buissons des pentes voisines, on allume un bûcher gigantesque et sur la pierre surchauffée, on répand le vinaigre réservé jusque-là pour étancher la soif des soldats. L’acide attaque la roche, les hommes taillent, fendent, ouvrent enfin un sentier.
Et l’armée passe.
 
 
 
 
 
 
 
 
                                   Les axes de circulation en Ceutronie
 
           
 
            Les Alpes ont été couramment traversées dès l’époque néolithique. Ce trafic ne fera que s’amplifier durant l’antiquité. Le réseau routier romain, que l’on a put retrouver sans difficulté, est la version qui succéda aux pistes et chemins tracés par les Celtes. Grands bâtisseurs, les romains mirent sur pied un réseau de communication efficace, qui a été l’un des attributs de leur domination sur le monde antique pendant des siècles. La plus ancienne de ces voies est la fameuse « Via Appia », construite en 312 av. J.C. entre Rome et Capoue.
La voie principale de Savoie, traversait toute la Ceutronie et le pays Salasse dans leurs longueurs. Les principaux vestiges se trouvent, dans la vallée d’Aoste, au Col du Petit- St- Bernard et à Vienne (Isère). L’itinéraire d’Antonin et la table de Peutinger (dont une reproduction est visible au musée de Saint Romain en Gal près de Vienne) précisent le parcours suivi par la grande voie impériale Milan- Aoste- Vienne. En quittant la plaine du Po, on trouvait : Aoste (Augusta Praetoria), Pré-St-Didier (Are Brigium), La Thuile (Ariolica), Petit-St-Bernard (In Alpe Graia), Bourg-St-Maurice (Bergentrum), Aime (Axima), Moutiers (Darentasia), La Bathie (Obilonna), Albertville (Ad Publicanos), St-Pierre-d’Albigny (Mantala), Chambéry (Lemincum), Les Echelles (Lavisco), St-Génis-d’Aoste (Augustum), Bourgoin (Bourgonis) et Vienne (Vigenua) . Vienne étant la plus grande ville et la capitale de  toute la Gaule romaine !
            Le carrefour d’Ad Publicanos conduit à Genève par Casuaria (Faverges) et Boutae (Annecy). Le long du Rhône une autre voie relie Genève à la route d’Italie par Etanna (Yenne) et Condate (Seyssel). Des voies secondaires unissaient Annecy et Aix-les Bains, Genève et Passy.
            Après la soumission des Allobroges (-121), est créé la province de la Transalpine (future Narbonnaise) qui, contournant les Alpes, s’étend sur toute la partie méridionale de la Gaule et remonte la vallée du Rhône jusqu’au Léman, avec Vienne pour capital.
            La grande voie pour gagner l’axe rhodanien et l’Espagne est alors la Via Domitia qui, longeant la côte méditerranéenne, passe par Gènes, Fréjus, Aix, Arles, Narbonne.
            Mais les Alpes restent insoumises et, qui plus est, mal connues. Pline l’ancien parle d’un « rempart infranchissable ». Empruntant à de nombreuses reprises le Petit- St- Bernard et le Montgenèvre, Jules César est harcelé par les peuples des montagnes. Plus d’une fois il choisira même d’acheter son passage pour faire passer ses légions…
            Son successeur Auguste, après une série de guerre pour soumettre les tribus des Alpes, entrepris d’établir de grandes voies de communication de part et d’autre des Alpes. Outre celui du Montgenèvre, le principal axe transalpin sera, dans notre région, la route entre Milan et Vienne par la vallée d’Aoste, le col du Petit- St- Bernard et la Tarentaise, dont la construction est confiée au général Agrippa. Plus tard sera achevée la voie empruntant le col du Grand- St- Bernard, itinéraire plus directe pour gagner l’Helvétie.
            Voici ce qu’écrit Strabon dans le livre IV de sa géographie, en l’an 18 : « Pour le voyageur qui franchit la chaîne des montagnes en venant d’Italie, la route suit d’abord cette vallée (Val d’Aoste). Ensuite, elle se divise en deux embranchements, l’un qui passe par ce qu’on appelle le Poenin, impraticable aux attelages vers la crête des Alpes, parce qu’étroit et raide ; l’autre qui passe plus à l’ouest par le territoire des Ceutrons. »
            Cette voie impériale reliant Mediolanum (Milan) à Vigenua (Vienne) étaient constituée de plusieurs couches de matériaux (gravier, sable, pierre, chaux) alternées, de 30 à 40 cm. d’épaisseur, revêtue soit de gros pavés, soit de dalle de pierre, et large de 3 à 5 m. en moyenne.
En outre, dans les passages délicats, des ouvrages d’art furent construits : ponts de pierre à arche unique, remblai, murs de soutènement, chaussées taillées dans la paroi rocheuse…Cet itinéraire transalpin présentait l’immense avantage, ainsi que l’indique Strabon, de pouvoir être « parcouru en chariots » sur toute sa longueur. Il fut avec le passage du Montgenèvre, l’axe routier commercial le plus important entre la plaine du Po et la Gaule pendant toute l’époque romaine.
            Cette voie alpine comme toutes celles de l’Empire, était jalonnée de bornes, hautes de 2 à 3 mètres, appelées milliaires, en référence au mille romain, unité de mesure de base équivalant à 1480 m. Le village de Séez, en contrebas du Col du Petit- St- Bernard, sur le versant ouest, tire son nom de la Sextus Lapis, la borne n° 6.
            De même, des relais routiers étaient disposés tout au long du tracé, pour permettre aux hommes et aux bêtes de se sustenter et de se reposer à chaque étape et, aux courriers du service postal impérial, de changer de montures. Ces gîtes d’étape étaient : officiels – les mansiones – ou privés.
            Un mansio, le seul dont on ait conservé la trace en Savoie, se trouve au Col du Petit- St- Bernard, point culminant de la voie romaine, à plus de 2100 m. d’altitude. Les fouilles archéologiques menées dans les années 1930 ont mis à jour les ruines d’un vaste édifice rectangulaire (67,5 m. x 25,5 m.) s’organisant autour d’une vaste cour centrale et abritant auberge, chambres, écurie, hangar pour les voitures et même un fanum, petit temple dédié à Graius, la divinité locale des Ceutrons assimilée à Hercule – d’où le nom donné au col par les romains : In alpe Graia. Quant à la fameuse colonne Joux, aujourd’hui surmontée d’une statue de St- Bernard de Menthon, elle était dédiée à Jupiter (Jovis).
            Ce col appelé : In Alpe Graia, puis colonne Joux est aujourd’hui : Le petit- St- Bernard ! Il fut aménagé par les romains alors que les Ceutrons n’étaient pas totalement domptés, pourquoi ?
            Le Grand- St- Bernard (Mont- Joux) culmine 300m. au dessus du Petit- St- Bernard ! A ces altitudes, 300 m. de plus ont une importance considérable sur les conditions climatiques, sur l’effort demandé aux organismes. On estime aujourd’hui que 300m. de dénivelé représentent dans de bonnes conditions météorologiques et pour un alpiniste entraîné, 1 heure de marche. Par mauvais temps, dans le brouillard, malgré l’aide d’un guide on marchera deux ou trois fois plus longtemps. S’il neige et qu’il fait la tempête on ne passe pas ! De plus sur son versant italien, la raideur du col est un inconvénient majeur.
            Le Mont- Cenis se situe à une altitude raisonnable. Ici, le gros problème est : la vallée de Maurienne ; empruntée par un torrent furieux ‘’l’Arc’’ et des affluents encore plus terribles ; il était trop risqué, trop long et trop cher de tracer une voie dans cette longue vallée. Bien plus tard, sous Charlemagne, la route devra monter souvent le long des versants, pour redescendre en fond de vallée et chercher sans arrêts à se faufiler à travers tous ces cours d’eau un jour à sec, un jour en cru.
            Enfin le Montgenèvre, bénéficiant d’une altitude peu élevée et situé beaucoup plus au sud, sera un passage fréquenté par les Romains.
            Voilà pourquoi les romains donnèrent la priorité au Petit- St- Bernard. Ils équipèrent le passage le plus connu et le plus fréquenté des Alpes avant leur arrivée. Ils reprirent ni plus ni moins, en l’améliorant, le passage qu’avait suivi Annibal avant eux !
           
           
 
 
 
                                                Allobroges vaillants
 
 
           On ne peut parler des Ceutrons sans évoquer les Allobroges. Ce peuple Celte, avec tout ce que ce qualificatif comporte de noblesse, de courage, de défit guerrier et de culture reconnue, s’était établi entre l’Isère et le Rhône. Comme tous les Celtes, ils étaient inorganisés, ils avaient une confiance aveugle envers leur chef et plus encore envers leur longue épée qu’ils tenaient dans leurs bras puissants. Cette confiance dans leur seule force physique, jointe à leur hospitalité légendaire, fut la cause de leurs déboires avec les armées romaines.
Tout commença avec une tribu ligure du sud-est de la Gaule :  les Saluvii ou Salyens et son roi Teutomalius. Ce peuple avait comme capitale Entremont véritable place forte. Il ravageait les terres romaines proche de la Méditerranée et menaçait Massalia (Marseille) un des plus beaux ports romains. En 124 av. J.C., Sextius Calvinus installe ses engins au pied de la forteresse d’Entremont. Les Salyens défendent leur ville, qui est aussi leur sanctuaire, avec acharnement. Entremont est complètement détruite sous les boulets de pierre dont on a retrouvé de nombreux exemplaires.
Le roi Salyens Teutomalius prend la fuite avec sa suite et se réfugie chez… les Allobroges ! Les légions abattent le sanctuaire, en cassent les linteaux et brisent les statues des guerriers héroïsés, honneur de la tribu.   Strabon (VI, 1,5 ) commente la victoire en ces termes : « Sextius qui vainquit les Salluvii, après avoir fondé une ville qui porte son nom : Aquae Sextiae(1), y établit une garnison. Il refoula les barbares jusqu’à la côte et donna à Massilia les terres qu’ils avaient abandonnées ».
 Domitius Ahenobarbus, le consul « à la barbe d’airain » digne successeur de Sextius Calvinus, réduisit à la merci de Rome les Celtes Allobroges, protecteur de Teutomalius, le roi salyen d’Entremont qui s’était réfugié chez eux. Il les défait à Vindalium en 122 av. J.C., un endroit qui n’a pu être localisé avec certitude, certains disent : Bédarrides, d’autres Mourres-de-Sève, d’autres encore Vedène ou peut-être Sorgues ; on a gardé le souvenir de cette bataille ; Orose (2) la cite :
« Le proconsul Domitius Ahenobarbus vainquit les gaulois Allobroges près de l’oppidum de Vindalium dans une guerre très grave. L’aspect des éléphants frappa de terreur et mit en fuite la cavalerie des ennemis et puis toute l’armée… On rapporte, ajoute Orose, que les Allobroges eurent une perte de vingt mille morts et de trois mille prisonniers ».
Le livre LXI de Tite-Live indique :
« Le proconsul Cn. Domitius remporte, près de Vindalium, une victoire sur les Allobroges, qui s’étaient attirés cette guerre pour avoir reçu dans sa fuite et aidé de tous leurs moyens Teutomalius, roi des Salluviens, et pour avoir ravagé le territoire des Aedues, alliés du peuple romain(…). Le consul Fabius Maximus, petit-fils de Paul Emile, remporte une victoire sur les Allobroges et sur Bituitus, roi des Arvernes. Cent vingt mille hommes de l’armée de Bituitus furent taillés en pièces. Lui-même, étant parti pour Rome afin de satisfaire aux ordres du sénat, fut retenu et mis en surveillance à Albe, parce que son retour en Gaule paraissait dangereux. On ordonne aussi par un décret de saisir son fils Congentiatus et de l’envoyer à Rome. Les Allobroges sont reçus à discrétion ».
 D’autres textes permettent de préciser : « Domitius écrasa les Allobroges à Vindalium, endroit de localisation incertaine, sans doute sur la Sorgue. L’armée de Fabius, dépêchée en renfort, défit une coalition des Arvernes et des Allobroges au confluent de l’Isère et du Rhône. Fabius, pour avoir reçu la rédition des Allobroges, obtint, outre le triomphe, le surnom Allobrogicus. »
Néanmoins les romains n’étaient pas au bout de leur peine. Les Allobroges vaincus se soulevèrent encore sporadiquement. Pompée nommé proconsul (77 av. J.C.), traverse la Gaule méridionale pour mettre Sertorius à la raison en Espagne. Il y rencontre une vive opposition.
Profitant de la situation les Celtes se révoltent : Voconces, Allobroges, Volques et Helviens entrent en résistance.
Un autre personnage de sinistre mémoire, Fonteius, proconsul pendant 3 ans, combat les Voconces et les Allobroges avec succès et met ces peuples en coupe réglée. L’Allobrogie subit les exactions du propréteur Marcus Fontéius, habilement disculpé à Rome par le grand orateur Cicéron.
Les Allobroges allèrent jusqu’à s’en plaindre à Rome mais en vain !
« Nous ne sommes pas tellement écrasés par vos victoires, ô! romains, que nous ne puissions nous redresser sous la honte de vos injustices » s’écriait devant le sénat le chef  Allobroges Indutiomare. (3)
En 66 av. J.C., les Allobroges se révoltent encore et sont à nouveau vaincus, cette fois par C. Calpurnius Piso.
En 63 av. J.C., ils ont à nouveau recours à l’arbitrage de Rome ; Salluste dans Catilina évoque leur plaidoyer :
« Ils (les Allobroges) sont accablés de dettes publiques et privées. Il n’est rien de si pénible qu’ils ne soient disposés à faire passionnément pour délivrer la Cité de sa dette. » Rien ne se passe. Ils reprennent donc les armes en 62 av. J.C. élisant comme chef de guerre : Catugnatos (le fils de la bataille) qui est vaincu près de Solonium (un endroit non encore identifié) par C. Pomptinus ou Promptinus.
Après tant d’efforts et de sacrifices pour maintenir leur indépendance, cette nation rebelle, fière et digne d’un meilleur sort, se soumit de bonne foi à la domination romaine. Après cela, les Allobroges dénonceront Catilina, refuseront leur aide à Vercingétorix et seront annexés (déjà ! ) à la province Narbonnaise.
Comme nous l’avons déjà vu plus haut, les plus têtus, trop fiers pour se soumettre (même au romain), s’exilèrent dans les hautes vallées. Les Ceutrons en accueillirent un grand nombre, ce nouvel apport confirma les caractéristiques très marqués de la race : têtus, fiers, indomptables et épris de liberté.
 
 
(1)Aquae Sextiae : Aix en Provence
 
 (2) Paul Orose, historien et théologien du VI e siècle (histoire contre les païens)
 
 (3) Nous constatons que ce n’est pas d’hier que les peuples de Savoie sont annexés et contraints par d’autre puissance. Que voyons-nous aujourd’hui ? Les Romains ne nous gênent plus depuis bien longtemps. L’occupant actuel lâchera prise tôt ou tard. Il sera le dernier à imposer sa loi au peuple des Alpes de Savoie ! La civilisation mondiale actuelle, garante des droits de l’homme, ne permet plus et ne permettra plus l’autorité d’un pays sur un peuple. Soyons confiant ! Poursuivons notre lutte !
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
                                                           Vercingétorix
 
 
 
 
Un mot,  sur le plus célèbre des chefs Celtes : le Gaulois Arverne Vercingétorix. (1)
Au printemps de 52 av. J.C., les Carnutes de Chartres massacrent les commerçants de Cenabum (Orléans). Les Arvernes se réveillent alors sous la férule de l’inflexible Vercingétorix, fils de Celtillos, de sang royal ; ce fédérateur réussit ce que des siècles de particularisme avaient jusqu’alors empêché : il fait l’union sacrée d’une grande partie de la Gaule contre César. Voici un extrait de ‘’Bello Gallico’’.
« Après maintes discussions sur ces projets, les Carnutes déclarent que pour le salut de la patrie il n’est pas de danger qu’ils n’acceptent, et ils promettent d’être au premier rang des révoltés.
Quand arrive le jour convenu, les Carnutes entraînés par Cotuatos et Conconnétodumnos, hommes dont on ne pouvait rien attendre que des folies, se jettent, à un signal donné, dans Cénabum, massacrent les citoyens romains qui s’y étaient établis pour faire du commerce, mettent leurs biens au pillage.
La nouvelle parvient vite à toutes les cités de la Gaule. En effet, quand il arrive quelque chose d’important, quand un grand événement se produit, les Gaulois en clament la nouvelle à travers la campagne dans les différentes directions ; de proche en proche, on la recueille et on la transmet. Ainsi firent-ils alors ; et ce qui s’était passé à Cénabum au lever du jour fut connu avant la fin de la première veille chez les Arvernes, à une distance d’environ cent soixante miles.
L’exemple y fut suivi : Vercingétorix fils de Celtillos, Arverne, jeune homme qui était parmi les plus puissants du pays, convoqua ses clients et n’eut pas de peine à les enflammer. (…)Il convertit à sa cause tous ceux de ses compatriotes qu’il rencontre ; il les exhorte à prendre les armes pour la liberté de la Gaule ; il rassemble de grandes forces et chasse ses adversaires qui, peu de jours auparavant, l’avaient chassé lui-même. Ses partisans le proclament roi. Il envoie des ambassadeurs à tous les peuples : il les supplie de rester fidèles à la parole jurée. Il ne lui faut pas longtemps pour avoir à ses cotés les Senons, les Parisii, les Pictons, les Cadurques, les Turons, les Aulerques, les Lémovices, les Andes et tous les autres peuples qui touchent à l’océan. A l’unanimité, on lui confère le commandement suprême. Investi de ces pouvoirs, il exige de tous ces peuples des otages, il ordonne qu’un nombre déterminé de soldats lui soit amené sans délai, il fixe quelle quantité d’armes chaque cité doit fabriquer, et avant quelle date ; il donne un soin particulier à la cavalerie. A la plus grande activité il joint une sévérité extrême dans l’exercice du commandement ; la rigueur des châtiments rallie ceux qui hésitent… »
César frôle le désastre devant ces forces désormais unifiées. Son infanterie se fait enfoncer par la cavalerie gauloise au sud du territoire des Lingons, sans doute aux environ de Dijon. Cependant, la cavalerie germaine, bien supérieure aux Gaulois, dégage les romains.
Vercingétorix est alors contraint à la retraite ; c’est alors qu’il commet l’erreur fatale. Il s’enferme dans Alésia, espérant que les légions seraient prises en tenaille : lui-même et sa garnison, et les forces de secours qui, espère-t-il, ne tarderont pas à prendre les romains à revers.
César construisit, tout autour de la cité, une série impressionnante de travaux de fortifications, isolant complètement l’armée de Vercingétorix qui, bien sur, ne reçut jamais le secours escompté.
Affamés, épuisés, les Gaulois se rendent. Vercingétorix remet ses armes à César, est emprisonné, traîné à son triomphe, puis étranglé après plusieurs années passées dans les geôles romaines.
 
 
 
(1) (selon S.O.U.C.I.) Vercingétorix : Les terminaisons en «ix » sont typiquement Celtes. Voici la définition ou  l’explication du nom : « Vercingétorix » sur laquelle ont buté tous les historiens sans exception !
            Les chefs Celtes avaient la confiance totale de leurs hommes. Si par malheur ils étaient vaincus, le chef se livrait à son vainqueur, donnant sa vie pour sauver ses soldats. La défaite, pour eux, n’était pas due à leur faiblesse ou à un manque de vaillance mais aux dieux qui leur étaient contraire !
            Il était impensable, à un chef Celte, de se soumettre. Vercingétorix, après sa défaite, hésita longuement ; devant la détresse de ses hommes mourant de faim, il se décida enfin. Pour se donner du courage, la légende dit qu’il but quelques jarres de vin des coteaux de la Loire. En son fort intérieur il se sentait humilié et coupable et se répétait : « J’ai tort, j’ai tort de me rendre ! »
            Arrivé devant César, il garda une attitude digne, ayant jeté ses armes aux pieds du vainqueur, celui-ci le fit entrer dans sa tente. César pour montrer sa supériorité, l’étendue de sa culture, ainsi que pour faire étalage de sa richesse et du degré élevé de la civilisation romaine, partait en campagne avec toute une suite, et, dans ses bagages, le suivait partout : un service de verres, sa fierté. Avec orgueil il se fit servir un verre de vin de bourgogne et en offrit un à Vercingétorix qui ne connaissait que les ustensiles en bois, en corne de bête, voir en bronze ou en fer.
            « Tiens, Gaulois, bois un verre à ma santé, lui dit-il ! ». Ce mot verre était prononcé pour la première fois devant lui ; Vercingétorix, déjà bien enivré et de plus passablement contrarié, ne retint pas le mot ‘’verre’’ ; par contre il but et appréciât le bourgogne.
            César posa diverses questions au chef gaulois. Le scribe enregistrait en latin toutes les dépositions. Vercingétorix toujours tenaillé par le remords réclamait encore à boire  pour supporter son malheur en disant : « Verse un… », montrant le verre (qu’il ne savait nommer) du menton ; puis torturé à l’idée de se rendre : « j’ai tort ! j’ai tort, hic ! ». le point de suspension prenant la place du mot verre qu’il n’avait pas retenu. Le hic, tenant à l’emprise de l’alcool…
 César impatient : «  Scribe inscris le nom du vaincu … Gaulois comment t-appelles tu ? »
Le Celte de plus en plus assoiffé, cherchant l’oubli dans l’alcool, appréciant le bourgogne du vainqueur et regrettant de plus en plus sa reddition : « Verse un … j’ai tort ! hic ! »
Le scribe nouvellement affecté en Gaule, inscrivit : Vercingétorix.
Voilà comment les vins des côtes de la Loire, alliés aux vins de Bourgogne, sont à l’origine d’une des plus grandes énigmes de l’histoire de nos ancêtres. La modestie de l’auteur dut-elle en souffrir, il était nécessaire d’informer les lecteurs d’une découverte capitale sur l’origine des noms de nos ancêtres. Pensez que, pour le seul nom de Vercingétorix, cela représente plus de 10 années minutes de recherche !
 
 
 
 
 
Entre Olympie et Coubertin (S.O.U.C.I.)
 
 
 
 
Revenons avec les Ceutrons ; la Colonne Joux voit passer des armées redoutables, avec des files interminables de soldats à pied, avec des cavaleries comptant plus de chevaux que toute la Centronie.
Aujourd’hui encore, les armées romaines passent et repassent dans les deux sens les Alpes. Quand elles font «profil bas » et longent discrètement la vallée, l’habitude veut que les Ceutrons les laissent passer ; surtout si le travail des champs les occupe. Si, par hasard, une troupe de soldats se montre trop menaçante, voir simplement arrogante, alors quelques feux s’allument de loin en loin, toujours aux même lieux, sur des promontoires où sont situés des «pierres à cupules ». L’alerte est donnée et les Ceutrons se rassemblent aux points névralgiques repérés et préparés à l’avance. Les Celtes sont d’abord guerriers, avant tout autre chose. Bien que bénéficiant des privilèges des habitants du Latium, ils n'en sont pas moins libres et invaincus ; il est bon de le rappeler de temps en temps, et d’en profiter pour faire un peu d’exercice, et celui ci est le sport préféré des hommes de la vallée ! 
Cette fois, les Ceutrons sont dans une vaste clairière, d’où partent, distants d’une bonne centaine de pas, deux larges «couloirs » ; ceux ci débouchent, en la surplombant, sur la grande voie qui mène à la Colonne Joux. Ces «couloirs » sont de véritables ravins avec des passages presque verticaux. Les armes sont peu nombreuses, par contre des pics à bois et de grandes et solides branches de frêne, efficaces leviers, sont entre leurs mains.
Ils sont prêts. De gros blocs de pierre sont disposés là. Mais aujourd’hui, priorité aux troncs d’arbre ; en effet, la dernière coupe de bois de l’automne n’a pas été «flottée », plusieurs sapins et mélèzes ébranchés attendent d’être descendus dans la vallée. Ainsi, les Ceutrons joindront l’utile à l’agréable. Dans un instant, les soldats romains passeront sur la voie « Agrippa ». Au signal d’un guetteur, des troncs, aussi lourds que 2 ou 3 chevaux, seront mis en mouvement avec les pics et les leviers, ils glisseront dans les «couloirs » ; prenant rapidement une vitesse vertigineuse, dans un bruit de tonnerre ils voleront dans la pente comme des fétus de paille. Balayant tout sur leur passage, ils s’écraseront sur la «voie romaine »…
Demain, les «billes » de sapins seront à port de route, prêtes à être tirées avec les mulets, et la troupe romaine sera anéantie par la même occasion !  Pourvu que leurs glaives ne soit pas trop tordus ! … Certains chercheurs ont cru reconnaître, dans cet exercice, l’ancêtre du jeu de quilles.
 Les Ceutrons, qui ne connaissent pas les délicats plaisirs culturels romains tels que : « les jeux du cirque », apprécient ces dérivatifs ponctuels. Dérivatifs ou exercices qui ne furent jamais réglementés ou codifiés (inconvénient du fameux esprit de liberté Ceutron) ; c’est pourquoi, ils ne purent être reconnus comme sport traditionnel ou jeux authentiques de la Centronie. Ainsi, tombèrent-ils plus tard dans l’oubli.
 Aujourd’hui, nous pouvons affirmer qu’il n’y a aucune chance de les voir un jour inscrits au programme des Jeux Olympiques modernes. La difficulté tenant moins à trouver des sites appropriés, qu’à sélectionner des adversaires aptes à remplacer les romains ! (S.O.U.C.I. fin)
Ces jeux Ceutrons n’étaient pas les seuls sports pratiqués. La chasse les avait habitués à lancer le javelot ou la lance ; à tirer à l’arc ; ils pratiquaient aussi la course à pied en côte et un genre de saut à la perche qui leur servait à franchir les ruisseaux. Le maniement de l’épée leur était familier, leurs bras puissants en faisaient de redoutables escrimeurs ; les soldats romains évitaient les corps à corps, avec eux, dans cet exercice ! La lutte faisait partie de leurs jeux, ainsi que des concours de force, de levage ; ce que l’on pourrait appeler aujourd’hui l’haltérophilie.
 Il existait dans l’ancien Tignes, sur la place du village, une grosse pierre circulaire parsemée de cupules et posée sur un piédestal. Cela faisait comme une monstrueuse table ; une fois par an, la ‘’dîme’’ (ou ‘’taille’’) de chaque villageois était déposée là. Le ‘’métral’’, collecteur de fond du Comte de Savoie, venait y chercher les impôts du village ! Les cupules relevées sur cette pierre confirment l’époque celte de celle-ci. Etait-elle le test suprême de la force Ceutrone ?
 Dans les toutes dernières années du 19ème. siècle, deux hommes du village arrivaient à la soulever : Un nommé Favre, plus connu par son surnom « le Fou de Tignes », dont les crises de démence décuplaient les forces, lui permettant, occasionnellement, l’exploit. Le deuxième, surnommé « Sissola », personnage alliant à une stature de colosse : humour et adresse, la soulevait quand il le désirait par sa seule force naturelle ! Tignes est noyée mais la pierre à dîme ou de ‘’la Tailla’’ (récupérée à l’aide d’un tracto-pelle) est aujourd’hui scellée près de l’église des Boisses, sur la gauche de la façade.
L’équitation était le sport des chefs et de ceux qui avaient suffisamment de terre pour nourrir des chevaux. Les guerriers Celtes possédaient une redoutable cavalerie. Ils montaient à «cru ».
Enfin la natation était certainement leur point faible ; les torrents et rivières étaient trop tumultueux, et les lacs trop hauts et trop froids pour apprendre à nager.
 Le grand nombre de champions olympiques et champions du monde, relevé chez leurs descendants, témoigne de la qualité physique et sportive des Ceutrons.
 
 
 
Les guerriers Ceutrons
 
 
 
 
 
Les tribus Celtes, agricultrices et sédentaires depuis des siècles, se définissent encore comme guerrières, car toute autre activité porte en soi une connotation dépréciative. Chez les Ceutrons, on a pu reconstituer le «cursus » du guerrier type dans les phases successives de son initiation, de sa mise à l’épreuve, de son admission dans la classe des guerriers, de sa conquête de la «gloire immortelle » à laquelle chacun aspire.
Cette éducation comprend des épreuves d’initiation, souvent une chasse à l’animal ou à l’homme, qui confirmera l’aspirant comme guerrier, et lui permettra de prendre place parmi eux, de participer à la vie publique, aux sacrifices, de prendre part aux banquets des hommes libres autour du roi, et bien sûr de partir en guerre.
A la sortie des épreuves, le jeune homme reçoit ses armes une épée ou une lance et un bouclier. La lance, pique, javeline ou javelot fut en usage chez tous les peuples de descendance Celtes. La longue épée «laténienne » fut l’arme absolue au deuxième âge du fer.
Chez les Ceutrons, le métier des armes n’était fondé que sur le volontariat, et seulement quand les circonstances l’imposaient. Alors, chaque chef de village, de clan ou de province convoquait les hommes libres afin de les informer de ce qui les attendait : razzia ou attaque d’armée romaine, une activité guerrière qui faisait l’essentiel de la vie d’un homme bien né.
Chacun répondait joyeusement à l’appel, car pour ces peuples dit barbares la guerre était une seconde nature, ainsi qu’une occasion de conquérir, par quelque haut fait, la gloire immortelle à laquelle tous aspiraient.
La tactique était très rudimentaire : elle se réduisait à l’assaut désordonné et au choc frontal assorti de combats singuliers, très recherchés par ces héros en puissance assoiffés de «lauriers impérissables ». La guerre restait donc une activité occasionnelle et ludique mais avec des coutumes immuables.
Des chants de victoire accompagnaient d’étranges rites, tel le prélèvement des crânes des ennemis tués. Les Ceutrons pensaient qu’il était essentiel pour le guerrier vainqueur de recueillir le reliquat d’énergie vital que contenait la tête de l’ennemi mort dans un combat glorieux. Il faisait sienne cette énergie en emportant et en conservant ces crânes par momification dans l’huile de cade. Il clouait ces trophées à l’entrée de sa demeure ou il les conservait dans un coffre, pour les exhiber à ses visiteurs.
Cette chasse aux têtes s’accompagne d’un ramassage systématique des dépouilles de l’ennemi. On collectait soigneusement les armes éparses, et on les entassait en pyramides, sur le champ de bataille si le combat avait eu lieu loin du territoire de la tribu, dans les sanctuaires tribaux si l’affrontement s’était déroulé non loin de là. (1)
Lorsque les premiers Celtes envahirent les Alpes, ils eurent un atout capital pour vaincre les premiers habitants : leurs grandes épées de fer !
En effet, quand les premiers occupants des Alpes voulurent se défendre contre ces nouveaux envahisseurs leurs armes étaient : l’arc avec des flèches aux pointes en bronze, éventuellement en pierre taillée, la lance avec les mêmes pointes et de courts poignards en bronze.
En face d’eux s’avançaient de grands hommes, aux membres robustes, aux longs cheveux blonds, les Celtes. Ils aimaient combattre presque nus, ainsi pensaient-ils impressionner l’adversaire par leur mépris de la mort, leur grande épée de fer (supérieure dans les corps à corps au poignard en bronze), dans une main et un bouclier dans l’autre.
 (S.O.U.C.I.) D’aucuns, esprits chagrins, pensent que s’ils allaient nus au combat, c’était pour préserver leurs vêtements, afin de ne pas encourir les reproches acerbes de leurs compagnes à leur retour au foyer !  Même, si le comportement des descendantes Ceutrones, nos Tarines d’aujourd’hui, accrédite cette thèse, nous préférons croire au courage, à la provocation et au mépris du danger de nos ancêtres Ceutrons !
Strabon, géographe grec (58-25 av. J.C.) nous dit :  « La race qu’on appelle aujourd’hui dans son ensemble celtique, galatique ou gallique est passionnée de guerre ; elle est prompte à la colère, portée à se battre. Il suffit qu’on les irrite sous quelques prétextes pour les trouver prêts à tout risquer, forts de leur vigueur et de leur audace. Une fois excités, ils se rassemblent en foule pour courir au combat et cela avec éclat et sans circonspection, de sorte qu’ils tombent facilement entre les mains de ceux qui veulent user contre eux de stratégie. »
Cependant, allez user de stratégie dans ces ravins, ces défilés, ces bois obscurs. Envoyer une avant garde, pour repérer l’ennemi, c’est la condamner ! Manœuvrer une armée, dans ces boyaux, ces passages scabreux, est impossible ! Puis c’est l’avalanche soudaine de rochers, de terre, de pierres, d’arbres qui disperse et écrase les soldats. Avant que le nuage de poussière soit dissipé, les Ceutrons sortant de partout, comme s’ils étaient tombés avec l’avalanche, terrorisent l’adversaire par leurs cris (clamor, ululatus), leurs insultes, le vacarme des armes frappant les boucliers, la nudité héroïque dont ils se parent.
Ecoutons Polybe ( Histoires, II, 28, 7-8)
« Les Insubres et les Boïens allaient à la bataille vêtus de braies et de sayons commodes qu’ils avaient enroulés autour d’eux ; mais les Gésates, dans leur présomption et leur assurance, s’en étaient dépouillés et s’étaient placés au premier rang, nus, avec leurs seules armes… »
« Quand les troupes d’infanterie entrèrent en contact, ce fut une rencontre unique et extraordinaire(…) La quantité des buccins et des fanfares était incalculable, et il s’y ajoutait une si vaste et si forte clameur de toute cette armée poussant en chœur son chant de guerre que non seulement les instruments et les soldats, mais encore les lieux environnants qui en répercutaient l’écho paraissaient donner de la voie ; effrayants aussi étaient l’aspect et le mouvement de ces hommes nus du premier rang, remarquables par l’éclat de leur vigueur et de leur beauté. Tous ceux des premières lignes étaient parés de colliers et de bracelets d’or.
Ainsi étaient les Ceutrons qui firent partis de ces fameux Gésates ! Ne croyez pas que les colliers et bracelets en or étaient portés pour augmenter leur beauté. Il est reconnu qu’à cette époque, les soldats détroussaient les morts, leur prenant tout ce qui pouvait avoir de la valeur. Exhiber ces parures étaient une façon de dire : « regardez-moi, j’ai de l’or ; venez le chercher ! » c’était une provocation supplémentaire pour attirer l’adversaire à eux.
 
 
(1)- (S.O.U.C.I.) Quelques chercheurs prétendent que cette tradition se serait perpétuée jusqu’à nos jours, sous une forme plus civilisée. Ils citent, comme exemple, les échanges de maillots en fin de match  par les joueurs de football !
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
                             Industrie et arts Ceutrons
 
 
 
De leur industrie, on connaîtrait un monument, si on leur attribue la belle colonne de gneiss porphyroïde qui se dresse sur le plateau du Petit-St-Bernard. Sa hauteur est de 4 mètres 55 centimètres. Elle est distante d’environ cent quarante-trois mètres du cromlech de l’époque néolithique.
Le Cromlech est sans doute le plus ancien vestige du passé Ceutron.
 Moins connu semble être ce personnage sculpté en bas relief sur l’énorme rocher de grès et quartzite, qui haut de 8 m., se trouve à 100 m. de la sortie nord du Villaret des Brévières (Tignes). La sculpture située à 2 m. de hauteur, mesure environ 1m.30 de haut. Le personnage à la tête bien dégagée ; il porte une tunique courte qui s’arrête au-dessus du genou ; ses jambes plus profondément entaillées que le reste du corps, semblent nues. Sous un certain éclairage, le visage semble assez nettement suggéré dans une tête plutôt velue et chevelue ; plus nettement on peut distinguer un baudrier et une ceinture supportant une sorte de coutelas, tandis que sous la ceinture paraissent des incisions concentriques qui pourraient bien être des cryptogrammes évocateurs de culte solaire.
Un spécialiste, M. Schmittel situe volontiers cette sculpture entre le dernier millénaire av. J.C. et le premier siècle après. Ce personnage est orienté plein sud, il semble surtout surveiller le trajet habituel de l’avalanche de la Davie qui, à 200m. au sud, déboule pour se ruer sur le village des Brévières, où elle a sûrement sévi déjà au temps des Ceutrons. Ce «Ceutron du Villaret » étant l’un des plus précieux et trop rares vestiges de nos ancêtres et de leurs hantises.
 Les Ceutrons sont forgerons, ils savent extraire le minerai, en tirer le fer dont ils deviennent des spécialistes. Outre les armes, ils fabriquent de minuscules objets : les fibules, véritables objets d’art.
(S.O.U.C.I.) Quand ils ont l’occasion d’écraser une armée romaine, ils récupèrent tout ce qui est métallique sur eux. Les forgerons du coin ont l’habitude de reprendre leurs armes et leurs casques abîmées, ceux qui ne sont pas  présentables, comme trophée, dans leurs sanctuaires tribaux. Rendus malléables par le feu, ils peuvent en faire des haches, des pioches etc. De la même manière, les armures des soldats romains, plus fines, sont transformées en excellents couteaux dont le manche sera fait en mélèze ; fendu dans le sens de la longueur, on peut replier la lame dans le manche. Selon certain, l’adroit forgeron qui le premier eut l’idée de faire ces couteaux s’appellait Opinelix.
Grâce à leur technique du fer forgé, ils possèdent  de nombreux outils pour travailler le bois. Ce deuxième volet de leur industrie est peut-être le plus important. Outre l’exploitation des forêts pour les besoins de construction ou de chauffage, l’abondance du bois et la diversité des essences tant en feuillus qu’en résineux leur permet de créer toutes sortes d’objets utilitaires. Ainsi les journées d’hiver sont consacrées à la fabrication d’outils (manches, râteaux, fléaux etc.), d’armes (arcs, flèches, lance etc.) et de vaisselles (bols, couverts, seaux etc.). La vannerie est également connue et pratiquée.
Les Ceutrons, comme tous les Celtes, sont également constructeurs de chars. Grâce à leur maîtrise de la forge et à leur adresse à travailler le bois, ils fabriquent de redoutables chars de combat à deux roues. Le principe de cerclage d’une roue en bois avec une lame de fer serait du aux Celtes. La géographie de leur pays ne facilita pas l’expansion de ce type de transport. Seule la voie Agrippa était vraiment carrossable. Il est fort probable néanmoins qu’ils exportèrent cette production et qu’ils adaptèrent assez rapidement leurs chars de combat en chars utiles pour leurs travaux.
Les carrières sont exploitées pour la pierre de construction et la lauze. La Centronie est riche en salines dont ils exportent le produit chez les tribus voisines. Comme chez les Salasses, ils tirent de leurs «minières » de l’or, de l’argent, du cuivre et des cristaux de roche dont ils font, entre autre, des boucles de ceinture et des bijoux.
Au musée de Saint Romain en Gal (Vienne en Isère) se trouve un tonneau fabriqué par les Allobroges dont Vienne était la capitale. Il est donc certain que leur voisins Ceutrons possédaient également cette technique. Pour étancher ces premiers fûts ils utilisaient de la résine ou poix. Poix est dérivé du mot latin ‘’pix’’.  Nos vins de Tarentaise, comme le ‘’Pachet’’, déjà passablement ‘’verts’’ et ‘’apres’’, prenaient également le goût de cette  ‘’pix’’, de là viendrait le mot : ‘’piquette’’ que nous utilisons, encore aujourd’hui, pour qualifier un petit vin . Les chercheurs historiens de Saint Romain en Gal en sont, en tous cas, persuadés !
Les Ceutrons savent filer la laine, travailler les peaux et les cuirs. Toutes ces activités, ajoutées à leurs élevages et à la culture de la terre, leurs permettent de vivre en complète autarcie.
 
 
 
 
 
 
                        Les  Druides  et  Les  Dieux  Celtes
 
 
 
 
 
Pline l’Ancien évoque les gaulois : « Les druides, car c’est ainsi qu’ils appellent leurs mages, n’ont rien de plus sacré que le gui et l’arbre qui le porte, supposant toujours que cet arbre est un chêne. A cause de cet arbre seul, ils choisissent des forêts de chênes et n’accompliront aucun rite sans la présence d’une branche de cet arbre. » Toujours selon Pline l’Ancien : « Ils croient que le gui, pris en boisson, donne la fécondité aux animaux stériles et constitue un remède contre tous les poisons. »
Le mot druide est composé de deux préfixes augmentatifs do- et ro- et d’un radical –uid- qui désigne la sagesse, le savoir. Il est donc, étymologiquement, « le très savant ». De fait, le druide a tous les pouvoirs… ou presque. César l’affirme : « Dans toute la Gaule deux classes d’hommes comptent et sont honorées(…). De ces deux classes, l’une est celle des druides, l’autre celles des chevaliers. Les premiers veillent aux choses divines, s’occupent des sacrifices publics et privés, règlent toutes les choses de la religion. » Il a le droit de parler avant le roi, qu’il conseille et qu’il guide.
37 Av. J.C. sous Tibère, un décret du Sénat romain est pris contre les druides gaulois et « toutes cette engeance de devins et de guérisseurs ».
Des écrits de César aux multiples témoignages qui nous sont parvenus, on peut aisément déduire que le druide n’est pas un simple « philosophe » mais bien un « prêtre » dans tous les sens du terme. Loin de la fantaisie romantique ou « Baba-coolesque », le clergé druidique est extrêmement organisé et hiérarchisé d’une manière tripartite. C’est Strabon qui résume le plus clairement cette répartition des fonctions : « chez tous en général, il y a trois classes à qui on rend les honneurs extraordinaires : les bardes, les vates et les druides. Leurs bardes sont chantres et poètes, les vates sont sacrificateurs et interprètes de la nature, et les druides, outre les sciences de la nature, étudient la philosophie morale. » A quelques approximations près, le tableau est fiable.
Noël, récupéré assez tardivement par le christianisme, correspond à l’antique fête de Genimalacta, et le solstice d’été se nomme en vieux celtique Mediosamonios
Symboles forts des Druides :
Le chaudron : Symbole d’abondance, de résurrection, de générosité, il est l’un des principaux attributs du Dagda (le dieu bon). Les guerriers blessés ou morts, qui y sont plongés retrouvent magiquement vitalité et énergie. C’est le thème d’une scène représentée sur le chaudron de Gundestrup (Danemark).
La Pierre de Fal : Elle symbolise le milieu du royaume, notion sacrée chez les Celtes. Elle désigne celui qui a été élu par les dieux pour la royauté. Il est envisageable que, pour les Ceutrons, le roc Pupin, à quelques centaines de mètres de l’entrée des gorges du Siaix, fut cette fameuse « Pierre de Fal ». Par la suite, la légende veut que St Jacques l’Assyrien, premier évangélisateur de la Tarentaise, construisit une chapelle sur ce lieu de culte païen (5ème. siècle). (1)
La lance : Ramenée par les dieux des « îles au nord du monde », elle symbolise la puissance ignée (qui est en feu), symbole solaire qui organise le chaos. Elle est inséparable du chaudron du Dagda qui, rempli de sang, l’apaise.
L’Epée : Elle symbolise l’air. Elle est aussi lumière, éclair et combat pour la conquête de la connaissance et la libération des désirs. Associée à l’idée de luminosité, elle est liée, dans toute la tradition indo-européenne, à l’idée de centre, d’axe du monde. Rien de surprenant qu’avec toutes ces qualités elle soit l’attribut royal de souveraineté par excellence.
L’Ordos : L’ordos est le maillet des druides, récupéré par les juges et les maîtres maçons. Appliqué sur le front des agonisants, il les aidait à passer dans l’autre monde. Il est l’attribut du dieu Sucellus (le bon frappeur), représenté généralement avec une massue d’if qui tue par un bout (dans ce monde-ci) et ressuscite par l’autre bout (dans l’autre monde).
Le Baton : Il est coupé de jour et doit être en chêne pour les druides, en bouleau pour les bardes et en if pour les ovates. Le druide demande toujours l’autorisation à l’arbre de couper la branche qui deviendra un objet aux fonctions diverses, utilisé dans les marches et les offices.
La Corne : Elle remonte à l’antiquité. on la sonne au début de chaque cérémonie, aux quatre points cardinaux, pour appeler tous les druides à l’assemblée.
Personnage clé de la civilisation celtique, le druide n’a pas survécu en Gaule à la conquête romaine. Victime d’interdits politiques, puis d’anathèmes religieux de la part du christianisme triomphant, la figure du druide disparaît de notre monde dès les premiers siècles de l’ère chrétienne.
Le gui est rare, aujourd’hui, dans ce qui composait la Ceutronie d’alors. Il devait en être d’autant plus précieux. Sans doute, les druides connaissaient-ils la façon de le cultiver, dans la basse vallée, sous les murs de Conflans. Ils avaient, par contre à leur disposition, d’autres plantes de montagne aux vertus supérieures (l’armoise, la gentiane, la résine de mélèze, la myrtille, etc.) dont ils connaissaient les propriétés. Il est probable qu’ils savaient mijoter plusieurs potions magiques. Après leur disparition, il fallu attendre plus de douze siècles, avant que quelques moines ne redécouvrent qu’une infime partie des connaissances druidiques et distillent les chartreuses, verveines, etc.     
Parmi les dieux Celtes citons : Cathodobua, la déesse guerrière. Vintius divinité indigène. Le Culte des fontaines, des feux, des mères fécondes (les Matrae). Sucellos : dieu au maillet, protecteur de la fécondité (Sylvain) ; Taranis : Roi du ciel (Jupiter) ; Dieux propres : animaux ou semi-animaux : Borvo : serpent à tête de bélier ; Cernunos : dieu solaire maître des bêtes fauves (porteur de cornes de cerf) ; Esus dieu forestier (un taureau accompagné de trois grues) ; Teutatés ou Toutatis : Totèmiques de chaque tribu ; Bélènos : guérisseur dieu de la lumière (Apollon) ; Donn : (« sombre ») dieu de la terre (Pluton) ; Gofannon : le forgeron (Vulcain) ; Lug : dieu du commerce et des techniques (Mercure) ; Mullo : dieu de la guerre (mars) ; Smertios ou Ogmios : dieu protecteur des troupeaux (Hercule).
Chaque espèce animale ou végétale avait sa divinité protectrice : Arto pour les ours, Epona pour les chevaux ; les chênes étaient protégés directement par Taranis, tout ce qui venait d’eux était sacré, notamment le gui, objet d’un culte rituel.
 
(1) Une particularité de la haute montagne est de posséder des sites particulièrement beaux, dont le panorama incite à la contemplation et à la rêverie. Il existe également des lieux plus mystérieux, un jour peut- être trouverons- nous une explication physique à des phénomènes qui paraissent surnaturelles : présences de feux- follets, bizarrerie d’un écho, courant d’air particulièrement doux eu égard à l’altitude, proximité d’une source aux propriétés médicinales, peut- être des radiations cosmiques impalpables, qui sait ?
Toujours est- il que ces lieux particuliers, où les indigènes ressentaient une sensation indéfinissable et surnaturelle, furent vite répertoriés par les druides et devinrent sacrés, servant de lieux de culte aux diverses divinités celtes. Un millénaire plus tard, le christianisme sera dans l’obligation d’investir ces lieux, afin de couper court aux croyances païennes que le peuple continuait à perpétuer. Le clergé fit élever, en ces lieux, des chapelles ou des oratoires ; nous pouvons citer entre autres : « Notre Dame des Vernettes (Peisey) ; Notre Dame de la Vie (St. Martin de Belleville) ; Notre Dame de la Gorge (Les Contamines- Montjoie) ; etc. ».    
 
 
 
 
 
 
                                               Rome et les Ceutrons
 
 
 
            Jules César nous raconte, dans ses «commentaires », que lorsqu’il passait les Alpes 58 (av. J.C. ) ; avec 5 légions romaines pour s’opposer aux ravages des Helvétiens : « Les Ceutrons, les Garocelles, et les Caturiges occupant les hauteurs, tachèrent de s’opposer à son passage, et que ce ne fut qu’après plusieurs combats qu’il parvint à les repousser et à passer chez les Vocontiens qui s’étendaient jusqu’à l’Isère, et de là chez les Allobroges ».
Cela mérite une explication… les a-t-il repoussés ? Les Ceutrons et leurs alliés occupaient les hauteurs d’Ocelum, entre Suze et Turin, c’est à dire le versant Est du Mont-Cenis. César lui-même dit qu’il parvint à passer chez les Vocontiens ; or ceux-ci n’existaient pas en Maurienne mais au sud des Hautes- Alpes actuelles ; donc : il dut dévier sa route. César, pour aller chez les Vocontiens, passa par le col du Mont-Genèvre. Vainqueur, il aurait du passer par le Mont-Cenis (chez les Garocelles, puis chez les Médulles) ; pour aller en Helvétie, c’était tout de même plus court !
En fait, la voie la plus directe, pour rejoindre ses alliés Allobroges et prendre les Helvètes à revers, consistait à traverser les pays Salasse et Ceutron en empruntant le Col du Petit-St-Bernard ; connaissant les «clients », César se garda bien de l’utiliser. La gloire et la fierté de César lui interdisent-elles de dire qu’il reçut ce jour là un véritable camouflet ? En tout cas, si ce n’est pas une retraite, ça lui ressemble !
          Les principaux alliés des Ceutrons, comme nous l’avons déjà dit, étaient les Salasses de la vallée d’Aoste ; ces deux peuples, retranchées dans leurs forteresses naturelles, se prêtaient un mutuel secours pour en défendre les portes à l’ennemi ; les bataillons les plus intrépides et les plus courageux ne pouvaient les débusquer de leurs terribles vedettes. D’ailleurs les savantes manœuvres et les formations en «carré » ou dites de «la tortue » des légions romaines, si efficaces en plaine étaient inapplicables en montagne.
 Veterus envoyé contre les Ceutrons, ayant épuisé toutes les ressources de ses forces et de son génie militaire, ne put les soumettre qu’en les privant du sel qu’ils tiraient de Darantasia (Moutiers) ; mais à peine se fut-il retiré, qu’ils rentrèrent bientôt dans leur indépendance et rejetèrent avec indignation le joug étranger qui pesait lourdement sur eux, préférant leur liberté à tous les plus beaux privilèges de Rome. Cette péripétie laisse à penser que Veterus s’attaqua à la Centronie par le bas de la vallée de l’Isère en venant de l’Allobrogie.
Pétrone est seul à prétendre que, entre 49 et 46, César aurait réussi à forcer le passage des Alpes Grées au col consacré à Hercule, le Petit-St-Bernard actuel.
Tous les peuples,  jusqu’aux Alpes, avaient succombé, tandis que les Ceutrons et les Salasses leurs alliés, semblables à un rocher immobile au milieu des flots courroucés de l’océan, jouissaient encore de leur liberté. Nulle puissance humaine ne pouvait les priver de ce bien qu’ils tenaient de Dieu seul.
          Rome victorieuse de Carthage, maîtresse de l’Orient et de l’Espagne, intervient enfin en Gaule, pour protéger Marseille depuis très longtemps colonie romaine. Après s’être emparé d’Aix, Sextius étendit sa conquête vers le nord jusqu’au pays des Voconces de la Drôme. Une campagne fut dirigée contre les Allobroges comme nous l’avons signalée plus haut. Puis, sous prétexte de venir en aide aux Helvètes, Jules César envahit la Gaule, la Belgique et la Bretagne(58-51 av. J. C.).
Rome est maîtresse du monde et Auguste succède à César !
Seuls les peuples des hautes vallées alpines ne sont pas soumis et rompent la continuité géographique romaine.
           Avant les campagnes coordonnées d’Auguste, quelques expéditions avaient été effectuées dans diverses parties des Alpes. La plus ancienne eut lieu contre les Salasses de la Vallée d’Aoste. Elle fut dirigée par Claudius Appius Pulcro, en 143 av. J.C. Cette première expédition eût peu de résultat, l’état d’hostilité persista jusqu'à l’an 25 av. J.C. époque où Auguste commença contre eux la série des grandes expéditions alpines.
 Les Salasses eurent le redoutable honneur d’être les premiers adversaires alpins de Rome pour 2 raisons : Ils maîtrisaient d’excellents et rapides passages d’Italie en Gaule, enfin, Auguste cherchait partout des métaux précieux pour financer ses guerres (les Salasses exploitaient des «minières » d’où ils tiraient de l’or, de l’argent, et du cuivre). Il était désireux d’enrichir son empire par le moyen que, bien avant lui, avaient employé les Phéniciens, et que devaient encore employer  une quinzaine de siècles après lui, les Espagnols découvreurs de l’Amérique.
Les Salasses opposèrent une opiniâtre résistance. Néanmoins, sous la direction d’un officier de valeur Aulo Terentius Varron Murena, l’armée romaine, envoyée contre eux, était assez nombreuse pour les envelopper, en fermant tous les passages de leurs vallées et les affamer. Les Salasses, éprouvant alors des difficultés pour se procurer du sel, se font ravitailler par les Ceutrons qui, retranchés dans leur montagne, constituent encore un peuple libre et bien pourvu, grâce aux pâturages, aux sels et aux mines.
 Cependant, le valeureux autant que fourbe général romain, qui savait les Salasses indomptables, usa d’une ruse perfide pour les affaiblir. Il parut se montrer généreux, et déclara ne vouloir qu’un tribut en argent de chaque particulier, leur laissant à tous la liberté. Au jour indiqué, des détachements de soldats arrivèrent, paraissant simplement chargés de percevoir les sommes imposées. Brusquement, ils se saisirent de tous les hommes valides (venus non armés) qu’ils réduisirent en esclavage. Trente six milles prisonniers furent conduit au marché d’Ivrée et vendus.
            Neuf ans plus tard, (16 av. J.C.) partant des Alpes orientales, Auguste entrepris une campagne de conquêtes qui l’amènera à soumettre toutes les tribus des Alpes (de la mer supérieure «Adriatique », à la mer inférieure «Méditerranée »).
Ce fut d’abord les «camunni » et les «vennoneti » vaincu par Publius Silius. Successivement, de proche en proche, par la raison qu’ils confinaient de l’un à l’autre, des peuples, que solidarisait   la haine envers les romains, entrèrent en action pour se prêter appui. Ainsi le proconsul Publius Silius dut combattre : les Trumpilini, entre le lac d’Iséo et le lac de Garde, les Venosti, dans la haute vallée de l’Adige, les Isarci de la vallée de l’Eisack, les Leponti sur le versant italien des Alpes entre le Mont Rose et le Mont Adule et les Viberi, lesquels occupaient les grandes Alpes où naît le Rhône.
An 15 av. J.C. : Auguste poursuit son objectif, deux grandes races réputées pour leur vaillance et leur fierté, qui avaient jusqu’alors maintenu leur indépendance : les Rhètes et les Vindéliciens sont attaquées et toutes leurs tribus soumises. Cette véritable guerre fut menée dans la partie centrale des Alpes. Auguste, désirant couvrir de gloire sa famille, la confia à ses fils adoptifs : Tibère et Drusus.
 An 14 av. J.C. : ultime expédition, concernant : les Alpes Graies du Mont-Blanc au Mont-Cenis, Les Alpes Cottiennes depuis le Mont-Cenis jusqu’au Mont-Viso, enfin les Alpes Maritimes du Mont-Viso jusqu’à la mer. Du nord au sud nous trouvons les tribus suivantes : les énigmatiques Acitavones ; les Médulli de la vallée de l’Arc dont la ville principale Medullum est devenue Modane ; les Uceni de la Vallée de l’Oisans etc., etc.…
Au total, 44 tribus alpines furent soumises, ainsi que l’indique le Trophée de la Turbie (construit en 6 et consacré en l’an 5 av. J.C.). Il est la preuve irréfutable et le témoignage historique de l’épopée des expéditions alpines d’Auguste.
            Quarante quatre tribus, plus ou moins connus, plus ou moins célèbres, mais pas de  Ceutrons ! ! ! Les Allobroges, les Salasses et les Ceutrons étaient les plus connus des peuples des Alpes occidentales ; les premiers, nous l’avons vu, furent soumis en 121 av. J.C., les seconds figurent sur la liste du Trophée de la Turbie ; mais que sont devenus les Ceutrons ? …
Certains historiens émettent l’hypothèse qu’ils auraient été pacifiés en même temps que les Allobroges…Impossible, puisque Jules César lui-même 58 av. J.C. se plaint de leurs attaques, plus tard, 25 av. J.C., nous les voyons venir en aide aux Salasses !
Il demeure donc un mystère qui entoure la fin des Ceutrons ; les derniers Celtes libres et souverains du continent Européen ! …A partir de là, une certaine liberté nous est laissée par l’histoire. La légende prend place. Chaque légende ayant pour point de départ un fait historique (voir la chanson de Roland) ; voici celle d’Irnec le Ceutron.
 
 
 
 
 
                                               IRNEC  LE  CEUTRON
 
 
 
 
             C’est le propre des légendes d’être enjolivées ou déformées au gré des conteurs. Le lecteur, prévenu, essaiera, de sélectionner ce qui est le plus probable ou possible ; sachant que l’histoire se déroule dans ces temps anciens où, les Dieux, dit-on, communiquaient parfois avec les hommes !  
            50 av. J.C., Astérix et ses Gaulois résistent encore et toujours aux romains, tout en haut de la Gaule, aux confins de l'Empire. Leur druide connaît la potion magique !
50 après J.C. Les Ceutrons résistent encore et toujours, bien qu'au centre de l'Empire Romain. Leurs druides connaissent les vertus du génépix  ! …
            La paix romaine est en place. Les romains ont abandonné l’idée de conquérir militairement  la Centronie. Cette région, trop montagneuse, trop pénible d’accès, trop difficile à investir et à contrôler a déjà coûté très cher en soldats romains. Toutes les tribus alentour fraîchement soumises n’attendent qu’une occasion  pour se soulever, surtout les Salasses. Rome a donc décidé d’en rester là ; de ne pas verser de l’huile sur le feu. Elle estime, avec raison, qu’à la longue les Ceutrons, complètement isolés et voyant les bienfaits de la Paix romaine chez leurs voisins, se rangeront à leurs cotés…
Depuis ½  siècle, les Ceutrons invaincus sont dans une curieuse situation : à la fois libres et à la fois bénéficiaires des privilèges des habitants du Latium.   Au rapport de Pline, l’empereur Auguste serait venu lui-même chez les Ceutrons pour étudier leurs mœurs et admirer leur bravoure. Il leur accorda les privilèges des habitants du Latium, ce qui prouve combien il les estime ; il les regarde plutôt comme des amis que comme des vaincus qu’ils ne furent jamais. Pour cette raison, la population hésite dans la conduite à tenir vis à vis des Romains, d’ailleurs très discrets dans la vallée.
Cinquante après J.C…. Un petit village Ceutron, niché sur un plateau à l’adret, est à demi caché par les derniers arbres fruitiers qu’autorise l’altitude : des pommiers, des cerisiers et des noyers. Les maisons en pierres et en bois : ‘’les cabornes’’ sont petites, basses et trapues. Leurs toits, couverts de lauzes, se rejoignent presque, abritant de petites ruelles empierrées : les ‘’t’sarires’’. Les constructions très resserrées offrent un double avantage : elles préservent un maximum de surface cultivable ; elles réduisent le déneigement, en hiver, facilitant l’accès d’une maison à l’autre. La position du village, en hauteur et en retrait de la grande chaussée empierrée qui longe la vallée, le préserve des bandits de grand chemin et des armées qui passent de temps en temps entre les provinces romaines d’Italie et de Gaule. Ce petit village, très coquet dans son environnement, porte le nom bien gaulois et celtique de : Vulmix. Le chef du village, nommé Facemos, habite la maison près du centre à la croisée de 2 chemins. Il fut élu, le précédant étant mort sans héritier, par les chefs de familles réunis sous les ordres du druide Ruazix, le jour où le soleil se lève très tard derrière le Mont-Pourrix (2) et se couche très tôt derrière la colline boisée. Facemos, dans la force de l’âge, a un fils de 16 ans dont il est très fier : Irnec.
            Irnec, grand pour son âge, apprit très tôt à se servir des armes de chasse : l’arc et la lance. La chasse procure un complément de nourriture très appréciable. C’est surtout un divertissement, un exercice physique excitant, indispensable pour muscler et garder un bras fort, des jambes infatigables, un souffle puissant et un œil perçant. Elle apprend aussi l’observation, la patience, l’endurance au froid, au soleil, à la faim et aux intempéries. Enfin elle forme à la connaissance et au respect de la montagne et de sa faune. La pratique de la chasse forme des guerriers alpins invincibles. Irnec est déjà un très bon chasseur, il rêve de combats, de trophées et de gloire.
Il mène également, dans les alpages, pendant la saison chaude, les petites vaches de couleur fauve, aux yeux bordés de noir, au museau court, aux petites cornes. Elles sont rustiques, bonnes laitières ; elles ont le «pied montagnard », et sont parfaitement adaptées à leur environnement. Elles sont la richesse des Ceutrons.
Du haut des alpages, la vue s’étend largement et permet de comprendre toutes les imbrications des vallées, de voir les falaises infranchissables cachées par la forêt et les raccourcis possibles.
Les bergers Ceutrons contemplent et apprennent la montagne. Ils connaissent les «couloirs », ces ravins où l’on fait descendre les «billes » de sapin et de mélèze ; ils ont repéré ceux dont le tracé coupe la grande voie empierrée ; ils savent où se trouve le meilleur emplacement pour rassembler de nombreux rochers qui avec l’aide de quelques perches peuvent rouler en avalanche et écraser chevaux, hommes et officiers. Ils dénombrent les pics, les hauts lieux, les promontoires qui dominent la vallée, d’où, en allumant un feu le soir, ils peuvent prévenir d’autres bergers Ceutrons à plus d’un jour de marche. Ils distinguent les cols lointains reliant une vallée à l’autre sans quitter la Centronie.
Dans cette vaste montagne, ils savent où se trouvent des troupeaux avec leurs bergers, prêts à les aider. Ils étudient les longs versants exposés aux chutes de pierres et menant nulle part, les lits de torrents paraissant infranchissables mais dont les Ceutrons ont le secret. Ils maîtrisent cette géographie en trois dimensions !
 Irnec connaît sa vallée. Il sait l’hiver rude, l’avalanche imprévue, emmenant chemin et maison, le torrent capricieux envahissant les prés, le gel du printemps anéantissant la récolte de fruits ou l’orage de l’été détruisant le champ d’orge. Dans sa haute vallée, la montagne est reine, elle commande au climat, au soleil même, elle ne pardonne aucune faute à l’homme. La montagne dirige et règle la vie de chaque jour, saison après saison, depuis toujours elle a formé l’homme qui l’habite à son image.
 L’Alpe est dure, âpre et sévère mais aussi tellement belle, généreuse et accueillante aux beaux jours. Un véritable paradis pour les gens simples qui veulent bien la comprendre. Irnec a compris tout cela, il sait que la montagne est son refuge, son alliée. Il sait que personne ne peut déloger les Ceutrons de leur pays, que les monts sont pour eux un asile sur. Il contemple sa vallée, il la connaît parfaitement, avec l’Isarra qui serpente au fond et, là, sur la gauche, cette large échancrure verte entre les rochers noirs :  « La Colonne Joux ».
 
 
 (2) Mont-Pourrix : Sommet le plus élevé dominant directement l’Isarra sur la rive gauche. Les flancs, des monts de Ceutronie, couverts d’alpages au-dessous de 2200 mètres, étaient partagés entre les diverses familles ou villages pour nourrir les troupeaux. Le Mont-Pourrix, avec ses flancs couverts de glace, trop haut et trop isolé, n’intéressant personne, ne fut pas attribué, d’où : « Mont pour X ». La révolution française et ses armées d’occupation, croyant à une prononciation celto-gauloise, transformèrent derechef en Mont-Pourri, déshonorant cette splendide montagne entourée de glaciers scintillants et certainement moins pourrie que ces envahisseurs d’outre-Rhône. 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
La Colonne Joux et
La fête des bergers
 
 
 
 
 
            La Colonne Joux est un lieu mythique et stratégique important dans tout le pays. D’abord, c’est là que passe la grande chaussée empierrée qui relie deux mondes. La largeur de la voie Agrippa (c’est ainsi que les romains l’appellent) varie de 3,5 à 5 mètres. Son tracé épouse au mieux le relief avec seulement 5 lacets. Cette route, véritable cordon ombilical, stimule les échanges entre les deux versants. La Colonne Joux, point culminant, sépare et unit, en même temps, Ceutrons et Salasses. Là, passent des hommes en armes, des marchands, des caravanes et tous versent un droit de passage.
            Certains voyageurs demandent à être guidés, durant l’ascension, principalement quand le brouillard s’étend à flanc de montagne et masque tous les reliefs. Irnec est souvent volontaire. A la mauvaise saison, le travail des champs laisse du temps de libre, et certains voyageurs sont généreux, surtout si la peur, le mal des montagnes et le vertige les ont saisis dans la traversée ! Il faut alors les accompagner dans la montée, puis descendre sur l’autre versant jusqu’au premier village Salasse. Irnec sera accueilli, avec cette chaleur coutumière entre gens de la montagne, malgré la méfiance manifestée envers son voyageur inconnu. Souvent, il passera la nuit, chez ses hôtes, avant de rentrer chez lui. Les Salasses font le même travail dans l’autre sens. 
 La Colonne Joux apporte d’autres revenus. Les chefs partagent et répartissent, entre chaque village, le butin constitué par : le tribut prélevé aux marchands, les bagages et bourses récupérés sur les cadavres de voyageurs accidentés (principalement au «creux des morts » passage délicat et dangereux pour les néophytes) et parfois les armes prisent aux soldats romains.
 Autre raison de l’importance de la Colonne Joux, c’est le point de rencontre avec des amis de toujours : les Salasses. Enfin, c’est aussi un lieu magique, avec une vue magnifique sur la plus haute montagne connue. Cette montagne, au sommet arrondie, est constamment recouverte de neige fraîche. Ses flancs sont si escarpés et vertigineux, le froid si intense et la glace qui la recouvre si épaisse que, bien sur, aucun chasseur ne pourra jamais y monter ! Salasses et Ceutrons l’appellent le Mont-Blanc.
 Irnec est allé, plusieurs fois, à la Colonne Joux, pour la fête des bergers. Deux lunes après que le soleil soit passé au plus haut dans le ciel ; c’est le grand jour. Avec son père et d’autres du pays, tous lourdement chargés, ils partent avant le lever du jour. Dans la fraîcheur matinale, ils vont avec cette aisance des gens entraînés à la marche. Cette facilité de marcher plusieurs heures, plusieurs jours, ne se retrouve plus, aujourd’hui, que chez certains peuples Himalayens, comme les Népalais. C’est une joie, de deviser chemin faisant avec ses compagnons.
 Quelques jeunes filles font parti du groupe, elles sont très bavardes et leur rire est un bonheur pour chacun. Irnec sait que, plus tard quand la côte sera rude et que le soleil chauffera les têtes, elles lui demanderont, à tour de rôle, de porter leurs sacs. Ce qu’il fera avec facilité, content de sentir ses muscles rouler sous sa peau sans effort et appréciant par avance le baiser que chacune lui accordera pour le remercier. Il n’est cependant pas dupe ; les filles qui vont à la Colonne Joux espèrent secrètement rencontrer quelque jeune Salasse charmeur, feignant la timidité.
 De son coté, il a aperçu, l’an passé, une jeune fille blonde dont les yeux donnent le frisson, quand ils croisent son regard. A chaque fois il en a le souffle coupé. Il en rêve souvent…il espère secrètement l’approcher aujourd’hui. Hélas, cette jeune beauté aux joues roses, à la peau de pêche, aux gestes si mesurés et gracieux, à la ligne si pure, est inaccessible…Elle s'appelle Lucrétia, elle est la fille du proconsul  nommé par Rome à Axima (1) !
En devisant ou en rêvant la troupe avance, le nombre de marcheurs augmente à chaque village traversé. Le chemin est large, bien entretenu mais très pentu après Villae-D’Amoun. Il longe un ruisseau «le Reclus », puis serpente dans un bois d’épicéas et de pins. En sortant de la forêt, ils aperçoivent Chavones, dernier village habité à la limite des alpages. Le soleil est maintenant levé. Les alpages sont immenses, coupés parfois par des barres rocheuses et des couloirs d’avalanches redoutables par mauvais temps.
 Heureusement en cette saison il fait beau, les troupeaux sont nombreux, on n’entend que le sifflement des marmottes et le grondement du ruisseau en contrebas. Comme prévu Irnec se charge de plusieurs sacs des filles, il doit même leur donner la main pour les aider et les rassurer dans les passages difficiles. Enfin…la pente s’adoucit, le plateau du col est en vue, ce plateau est si vaste qu’ils mettront encore du temps, pour parvenir au faîte, la ligne de partage des eaux, le but de la journée.
Il y a là, déjà, beaucoup de monde, des bergers et chasseurs comme eux ; tout le monde parle et s’interpelle. Ces gens sont simples et gais, un vrai bonheur se dégage de leurs retrouvailles. Irnec reconnaît les bergers Salasses, parmi eux, Brenn un jeune de son âge dont il fit connaissance l’an passé. Les Salasses arrivent par l’autre versant du col, ils parlent avec une prononciation différente de chez nous en Centronie ; Irnec les comprend très bien et cela l’amuse de les écouter. Les sacs sont déchargés, on échange les denrées et les objets avec les Salasses, c’est un véritable marché, où les commandes et les conditions sont fixées à l’avance, souvent pour l’année suivante. Depuis des lustres cela se passe ainsi entre les habitants des vallées alpines. Le col, avec la Colonne Joux dressée au milieu, l’environnement majestueux, la pureté de l’air,  tout invite les 2 peuples à une fête paradisiaque.
 
 
(1) Axima : Aime, ancienne capitale romaine de la Centronie
 
 
 
 
 
 
 
 
                        Les Salasses
 
 
 
 
 
Pourquoi sont-ils des amis ? Personne ne le sait. Ce fut toujours comme ça ! Même Ruazix ne put donner de réponses satisfaisantes ! Il se contenta d’expliquer que depuis des temps très anciens (que lui-même ne peut estimer), tour à tour, Salasses et Ceutrons se sont entraidés. Ensembles ils ont combattu les envahisseurs successifs, ensembles ils se sont opposés aux romains, ensembles ils ont imposé de lourds tributs aux riches caravanes qui traversaient les Alpes, ensembles ils sont allés piller de riches villes dans les plaines ; jusqu’à Rome qu’ils ont encerclée, il y a très, très longtemps.
Le père d’Irnec pense que d’être séparé pendant de nombreuses lunes, quand la neige bouche les chemins, donne à chaque fois une nouvelle joie de se revoir. Certains druides, très érudits, supposent que nos deux peuples seraient venus ensembles, de très loin à l’est, pour peupler les Alpes.
 En fait, nous nous ressemblons autant par notre physique que par nos coutumes. De plus, le nombre de femmes que nous allons chercher en Salassie et égale au nombre de femmes que les Salasses viennent prendre chez nous. Cela se passe sans animosité, au contraire, c’est l’occasion d’un jour de fête ; même si, quelquefois, un amoureux éconduit essuie une larme dans son coin ! La Colonne Joux, en ce jour de fête des bergers, permet aussi les retrouvailles de ces familles ; les embrassades et échanges de cadeaux n’en finissent pas !
 Les Salasses, moins riches en bois que les Ceutrons, sont curieusement plus habiles à le travailler. Ils font beaucoup d’objets utiles ou de décoration qu’ils échangent contre de la laine ou des peaux. Ils sont plus riches en fruits et en vigne que chez nous, leur climat étant plus sec. Les Salasses nous prennent surtout des bovins et du fromage que nous avons en plus grand nombre. Ils sont très demandeurs d'un produit précieux : le sel que nous extrayons de Salins ou de l’Arbonne ruisseau appartenant justement à Vulmix. Tout le village en a amené de grands sacs.
Mais voilà que les gens s’écartent ; un grand cercle matérialisé par d’énormes pierres, que seul un géant aurait pu soulever, se dévoile, là devant la foule. C’est le «cromlech ». Un à un, les druides des deux versants pénètrent dans l’enceinte. Bien que se présentant de dos, avec sa capuche blanche sur la tête, Irnec reconnaît Ruazix à sa démarche particulière qui lui fait avancer ensemble la jambe et l’épaule, du même coté, simultanément. Les druides parlent longuement entre eux, ils se transmettent et se rappellent ainsi oralement tous les souvenirs, tous les faits importants qui ont marqué l’histoire commune des 2 peuples. Par leur intermédiaire, nous pourrons sans le moindre écrit, connaître l’histoire du pays plusieurs siècles en arrière. Se retrouver régulièrement permet, à chacun d’entre eux, de se remémorer les faits anciens qu'il aurait pu oublier et permet également d'initier les jeunes druides à l’histoire de leurs ancêtres.
 Le cromlech est, encore plus tard, le lieu de culte aux dieux celtes : Taranis et particulièrement le dieu Penn. Le respect des croyances Ceutrones et Salasses autant que le manque d’informations sur leurs pratiques religieuses, imposent une certaine discrétion sur le déroulement de la cérémonie, où, vierges et serpents sont à l’honneur. La nuit sera largement tombée quand, Irnec et son père fourbus, s’allongeront sur la paille, dans leur maison de Vulmix.
 
 
 
 
 
Le sacrifice d’Irnec
 
 
 
 
Au fil des ans la présence romaine s’est affirmée. Un proconsul est nommé à Axima puis à Darentasia. Cette noblesse romaine est très respectueuse de la civilisation et des coutumes Ceutrones. Certains contactent les chefs de village et les initient, petit à petit, à leurs façons de vivre, leur montrant les avantages de la civilisation romaine. Les fils de chefs Ceutrons sont instruits avec les propres enfants des procurateurs et du proconsul. A la grande joie d’Irnec, celui- ci a pu, à cette occasion, faire connaissance de la belle Lucrécia. Ainsi se côtoient deux civilisations distinctes, s’enrichissant mutuellement à leur contact. Les jeux authentiques Ceutrons, consistant à écraser une armée romaine avec des pierres ou des troncs d’arbre, sont délaissés. Les romains, de leur côté, n’envoient plus de prisonniers gladiateurs à Rome depuis longtemps. Les Ceutrons ont le pouvoir de libérer les esclaves Celtes passant dans leur vallée. Ainsi, sans heurts, la paix romaine s’installe-t-elle avec des concessions de part et d’autre.
Cependant, les druides, dépositaires de la civilisation et des coutumes Ceutrones n’acceptent pas la tournure des événements, ni l’emprise perfide de Rome. Ils seront les premiers à se battre contre l’annexion de leur vallée (hé oui !).
Une légende que nous raconte R. Julien sur le détroit du Siaix, nous montre combien les Centrons avaient à cœur de conserver leur liberté et ce que firent les proconsuls romains pour leur rendre l’assujettissement moins dur :
« Voici l’une de ces portes que la nature fait d’un jeu de sa main. Deux rocs sont déchirés l’un de l’autre, à une profondeur effrayante, pour laisser écouler les eaux de l’Isère, qui sans ce passage formerait un lac dans la vallée supérieure. Le détroit du Siaix ou détroit du ciel, entre Moutiers et le Petit-St-Bernard, fut en quelques sortes les Thermopyles des Centrons, le boulevard de plus d’une grande scène de guerre. La route pratiquée à mi-côte passe au sommet de cet immense rocher, mais longtemps avant ce travail dû à la hardiesse de Charles-Emmanuel III, le chemin était au fond du précipice, c’était la voie romaine dont il reste encore des vestiges sensibles et que leur vétusté semblerait faire confondre avec les productions abruptes du reste de la nature ; tels sont les restes d’un pont qui traversait l’Isère ; tout près de la gorge, derrière ces rocs étaient retranchés les Centrons, qui par cette issue faisaient d’impétueuses sorties sur les légions romaines et jetèrent longtemps le veto sur l’universalité de l’empire d’Auguste.
A ces antiques souvenirs se rattache une touchante tradition.
« Faustinus, lieutenant d’Auguste, investi du pouvoir consulaire dans la Centronie avait cherché à rendre l’administration romaine douce à ces peuples nouvellement soumis et qui paraissaient à chaque instant prêts à secouer le joug. Pour arriver plus facilement à ce but il avait admis à sa maison quelques enfants des principales familles Ceutrones qu’il faisait élever à ses frais. Parmi ceux ci le jeune Irnec était remarquable par sa beauté virile ; il n’était de torrents fougueux qu’il n’eut la vigueur de franchir, point de chamois, de lynx ou d’aigles s’élançant d’un rocher qu’il n’atteignit d’un trait parti de sa main. Objet de l’affection de Faustinus, il apprenait avec une égale rapidité les sciences dont le proconsul aimait à le faire instruire ; aussi la belle Lucretia, fille adorée de Faustinus, aima Irnec, et celui-ci partageant en secret cet amour, devenait un lien de bonheur entre le peuple et la maison du proconsul.
« Le proconsul romain décidait l’union de sa fille avec le jeune Ceutron, lorsque les fêtes des Lupercales l’obligèrent à quitter Aime, son principal séjour, pour se rendre à Darentasia avec sa famille.
« Son départ ranima les espérances du parti opposé à la domination romaine, et durant une solennité que ce parti donnait à son tour dans un temple druidique tout près de la statue de Penn, il y invita comme évoqués par les mânes des ancêtres tous les jeunes Centrons. Irnec à qui sa religion n’avait pas permis d’assister aux fêtes des Lupercales, s’était rendu à celles du dieu de ses pères.
« Là un druide leur parla de la patrie humiliée et, rappelant à cette jeunesse remplie d’ardeur leurs parents morts dans les combats, il accabla de reproches ceux des Ceutrons qui avaient transigé en acceptant des faveurs romaines.
« Toute cette belliqueuse jeunesse fut saisie par les paroles sacrées et jura la mort des romains.
« Irnec, accablé de honte sous les regards de la foule, accepta des armes lui aussi ; mais dans ses mains elles devaient frapper un bienfaiteur. Mort aux romains ! Répétèrent les Ceutrons, morts aux romains ! Arrêtez, reprit le druide, votre ardeur va reconquérir la patrie, il est vrai ; mais sachez que la force sans la ruse ne réussit pas toujours, demeurez à cette place, et lorsque je vous dirai de marcher, la victoire sera assurée ; un seul romain ne pourra s’échapper.
«  Le druide se fit attendre un jour.
« Venez leur dit-il en arrivant, ce soir vous marcherez sur le corps du proconsul et de sa famille, vous aurez bon marché du reste de nos tyrans.
« Alors un bruit circule que des rochers entassés sur les hauteurs qui resserrent le chemin de l’Isère, doivent à un signal écraser le proconsul, sa famille et son escorte, en même temps qu’ils fermeront la vallée.
« L’image de Lucretia et de l’affreux danger qui la menace la rend au souvenir d’Irnec, qui rêve au moyen de la sauver. Cependant les Ceutrons marchent ; ils laissent derrière eux Bergentrum, Axima et viennent s’embusquer, selon le plan du druide qui les conduit, dans la gorge du Siaix, un peu en arrière des rochers sous lesquels la famille romaine devait trouver un tombeau. A la faveur des bois, Irnec gravit la montagne sans être aperçu ; il monte, monte toujours et arrive enfin au sommet de ce pic qui ferme la vallée et domine la route. Là, il trouve les Ceutrons qui épient l’arrivée des romains, pour donner le signal de la chute des rochers.
« Viennent-ils demande Irnec avec terreur ?
- Eh ! vois-les donc, s’écrie l’un d’eux, tu dois bien connaître la fille du despote, vois-la s’avancer dans un char à coté de son père. Puisse le dieu Penn nous être bientôt propice et faire périr tout ce qui porte le nom de romain !
 - O dieu Penn s’écrie le jeune homme, protège les innocents, protège le nom  romain !
- Arrêtons le traître, s’écrient les Ceutrons qui l’entourent, mais s’échappant de leurs mains, il descend vers l’escarpe du rocher, là où les chamois auraient eu peine à mettre le pied ; il s’arrête lorsque le roc cessant d’offrir quelques saillies, surplombe la vallée et laisse douter, par son élévation, si les profondeurs du ciel sont aussi dans l’abîme.
« De là, il fait des signes au proconsul, dont le cortège ne paraît que comme un point sur le chemin. Les Ceutrons s’étaient avancés jusque sur les bords du roc, pour voir quelle route allait suivre leur perfide compagnon, et comprenant qu’il cherche à dévoiler leur projet, ils bandent tous leurs arcs et les dirigent sur lui. Mais Irnec s’élance du roc comme s’il prenait son vol dans l’espace, en murmurant le nom de Lucretia, et tombe sur la route, où son corps brisé vient barrer le passage au char de la famille romaine. Les chevaux reculent épouvantés ; le proconsul voit au sommet du pic les Ceutrons armés, il ordonne à une des cohortes de sa suite de prendre l’avance pour aller connaître quel événement agitait le pays : Un instant après la terre tremble, et un nuage de poussière, qui s’élève plus haut que le pic, vient en roulant jusqu’aux lieux où il s’était arrêté.
« Bientôt il en sortit quelques soldats tout sanglants, échappés à la chute des rochers, dont le fracas continuait à retentir dans la gorge fatale.
« Le proconsul revint à Darentasia, rapportant sa fille évanouie, et le corps d’Irnec auquel il fit donner les honneurs de la sépulture romaine. »
 
 
 
 
 
                                                           C o n c l u s i o n
 
 
L'histoire des Celtes Ceutrons se termine sur un drame. Celle des tarins, des savoyards, commence avec la Dynastie de SAVOIE.
Les péripéties locales ne changeront pas le cours général, de l'Histoire de la Savoie proprement dite, dont vous avez, la description sur ce site.
Souhaitons que nos enfants retrouvent bientôt l'apprentissage de leur histoire, dans les écoles de chez nous.
Nous en sommes, aujourd'hui, réduit à apprendre une histoire qui est celle de notre envahisseur. Une histoire qui ne nous concerne pas.
Nous sommes, en Savoie, au XXI ème siecle,  dans la situation des petits Malgaches, du siècle passé, à qui on apprenait : ''Nos ancêtres les Gaulois''!
                                                                                             G.M.
 
 

 

 

 

                                                                                                                      G.M.
 
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